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En route vers Yakoutsk

 

Mardi 17 juin 2014

Enfin la route. Elle te manquait. Bob te guide jusqu'à la sortie de la ville. Depuis 4 jours, il aura passé la moitié de son temps avec toi. Il est pourtant chef d'entreprise.

Il faut un certain temps pour rejoindre depuis Irkutsk le Baïkal par le sud. Une route sinueuse qui n'en finit pas de passer des petits cols.

Tu as essayé de placer le bateau légèrement en retrait. Peut être 5 à 10 cm en arrière. Cela augmente le porte-à-faux, donc les efforts sur le réservoir arrière, mais comme il semble bien résister, autant te donner un peu d'espace. Tu apprécies la différence. Tu es beaucoup plus à l'aise dans les sections de terre, lorsque les travaux t'amènent sur des déviations. Tu arrives enfin à tenir la moto par les genoux, et à relâcher l'effort sur les avant-bras. Tout semble plus facile. Le nouvel espace te permet aussi de changer légèrement de position. Tu fatigues moins.

Depuis ton départ, tu t'es bien habitué au chargement. Si le positionnement de la béquille lors des arrêts reste un souci, tu as appris à reconnaître les bonnes positions. En tous cas, tu n'hésites plus à t'arrêter. Et voilà que tu ne crains plus non plus les zones de terre. Le pneu Désert tout neuf facilite aussi les choses.



Mercredi 18 juin 2014

Les paysages restent très beaux. Une steppe verte avec des collines à moitié boisées. Cela te rappelle les paysages de Mongolie. En 2010, alors que tu venais de Mongolie, tu n'avais pas été sensible à la beauté de cette région. Tu devais être blasé. Mais elle est réellement très belle.

200 km avant Chita, un couple de motards arrêtés sur le bas coté. Tu te gares près d'eux. Des Australiens. Ils font le voyage inverse à celui qui avait été le tien en 2010 : Vladivostok – Ulan Ude – Mongolie – Asie Centrale – Iran – Turquie... Ils ont des 250 TT. Tu te souviens des Canadiens qui avaient les mêmes motos. Ils s'émerveillent devant les steppes. Melissa n'a jamais rien vu d'aussi beau. C'est vrai que ces paysages n'existent pas en Australie. Mais tu penses qu'ils trouveront encore mieux bientôt en Mongolie. Tu aurais bien roulé quelques jours avec eux, mais vos directions sont opposées.

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Jeudi 19 juin 2014

Tu as dormi dans un petit hôtel 20km avant Chita. Le matin, alors que tu descends prendre ton petit déjeuner, la télévision retransmet un match de la coupe du Monde de football. La Russie joue contre la Corée, mais bien peu de monde semble s'intéresser au déroulement du match. Le foot n'a pas la renommée du hockey ici. Tu regardes cinq minutes et retournes emballer tes affaires.

Tu quittes Chita vers 8h. Les panneaux indiquent la prochaîne grande ville : Khabarosk à 2113 km. Les écarts entre les villes se creusent... Chita <=> Khabarosk est la section le plus désertique entre Moscou et Vlasdivostok. Peu de véhicules. Pourtant cette route est en excellent état. Ce qu'il y a de mieux en Russie.

Tu as mis ton GPS en mode « routage », et il t'indique imperturbablement : « Continuer sur L'Amour ». Un joli slogan. L'Amour doit être le petit nom de cette grande route. Un joli nom qui t'inspire. Il fait grand beau, les paysages sont magnifiques, et tu retrouves le plaisir de conduire. Tu peux penser aux personnes qui te sont chères. Tu as l'impression d'être avec elles. C'est en partie cette disponibilité qui te faisait tellement apprécier la moto lors de ton tour du monde.

Tu es toujours sur l'Amour l'après midi, mais le grand bonheur ne dure pas : il pleut. Des averses presque en continu. Il n'y a personne sur la route, pas de camion pour t'éclabousser, donc ce n'est pas bien grave.

Tu t'arrêtes pratiquement à chaque station service. Tu les reconnais toutes. Il ne faut pas trop jouer avec l'autonomie, et tu préfères refaire le plein de ton réservoir avant aussi souvent que possible. Jusqu'à Irkutsk, tu remplissais le réservoir avant, et attendais que l'essence se transfère dans le réservoir arrière pour rajouter deux ou trois litres. Mais dans les petites stations, les pompes sont souvent ancestrales et on ne te laisse pas attendre. On préfère te rembourser plutôt que laisser la pompe tourner à vide. Tu n'insistes pas. En faisant régulièrement le plein de l'avant uniquement, tu penses avoir une autonomie de 400km environ alors que la moitié te suffirait.

Tu finis ta route vers 19h. Le premier hôtel depuis très longtemps. Les prix sont 2 à 3 fois plus chers qu'ailleurs. Cela te rappelle les « Road-Stations » dans le bush Australien. C'est la loi du marché. Lorsque tu demandes un garage pour la moto, on trouve désormais toujours une solution. Tu peux donc laisser le bateau en place et ne démonter que ton sac.



Vendredi 20 juin 2014

Tu as encore 200 km sur l'Amour avant de prendre la route de Yakutsk. La route est toujours excellente et tu en profites.

L'intersection entre les routes de l'Amour et du Kolyma est construite sur le modèle des grands échangeurs des autoroutes américaines. Une rosace complète, avec plusieurs centaines de mètres de rayon de courbure. La route de Yakutsk est une deux fois deux voies sur 500 mètres. Elles passent rapidement à une fois trois voies, puis encore 500 mètres plus tard à une fois deux voies pour finir tout aussi vite par une route de terre. Mais l'échangeur était impressionnant.

Sur les 50 premiers kilomètres, une route nouvelle est en chantier. La route disponible est donc en très mauvais état. La principale gêne vient des camions du chantier. Ils sont omniprésents et soulèvent beaucoup de poussière. Heureusement, après la première petite ville tu auras droit à une vingtaine de kilomètres de route goudronnée. Et toute la suite sera ainsi : une succession de mauvaises routes de terre, de bonnes routes de terre, de vieilles routes goudronnées, ou encore de belles routes où l'asphalte vient d'être posé. La Russie du changement permanent.

Le cas de figure le plus fréquent est la bonne route de terre. Tu peux alors rouler assez vite pour éviter les vibrations due à la tôle ondulée. En revanche, lorsqu'il s'agit d'anciennes sections goudronnées, il te faut rouler suffisamment doucement pour éviter les chocs dans les trous. Mais tu te fais naturellement piégé : lorsque tu penses pouvoir accélérer, tu rencontres inévitablement un trou qui refroidit tes ardeurs.

La bonne nouvelle : alors que tu craignais beaucoup la conduite avec ton chargement, tu réalises rapidement la bonne maniabilité de l'ensemble. Bien sûr, tu redoutes les zones de sable, mais tu les passes à chaque fois sans réelle difficulté. Il n'y a que dans les descentes que tu es mal à l'aise.

Tu t'arrêtes à midi à Tinda, la principale ville avant Yakutsk. Tout d'abord une station service. Tu en profites pour demander s'ils ont un compresseur pour la pression de tes pneux. Négatif. Tu observes alors ton pneu avant, et tu réalises qu'il est bien dégonflé. Il ne reste qu'environ 0.5 bar. Le quart de ce qu'il te faudrait. Cela explique tes difficultés dans les descente. Tu te sens stupide. Tu aurais pu crever et abimer sérieusement ta chambre à air avec tous ces trous, toutes les pierres...

Tu décides de poursuivre doucement jusqu'au premier vulcanisateur. Il y en a plusieurs dans chaque ville. Tu refais la pression, mais elle semble ne pas tenir. Tu resserres la valve et réalises qu'elle était probablement pas assez serrée. Tu laisses la moto chez le vulcanisateur qui était prêt à t'aider au démontage de la roue et tu vas déjeuner dans un petit restaurant.

De retour à la moto, tu mesures à nouveau la pression. Elle semble stabilisée. Tu décides de laisser ainsi. Tout démonter prendrait trop de temps. S'il y a vraiment une crevaison, tu t'arrêteras dans une prochaine ville. Mais la fuite est certainement minime.

L'après midi est toujours la même succession de sections de route à l'état tellement variable. Tu essayes de rouler suffisamment pour avoir moins de distance le lendemain. Comme tu te sens crasseux, tu aimerais trouver un hôtel pour prendre une douche. Tu attends la prochaine ville, mais elle ne vient pas. Au contraire, tu te trouves à nouveau sur un chantier pendant près de 100 km. Le soleil est rasant et t'éblouit. Les ombres des arbres, la poussière permanente rendent la situation de plus en plus compliquée. Souvent, un camion que tu voudrais doubler. Mais lorsque tu l'approches, le nuage de poussière est si dense qu'il y a un temps important pendant lequel tu ne vois strictement rien. La conduite devient vraiment dangereuse.

Enfin, la petite ville attendue. Tu t'arrêtes dans la première « Gostinitsa » que tu trouves. Ce n'est pas vraiment un hôtel, mais un petit immeuble de l'époque soviétique dans lequel la plupart des locataires sont des résidents permanents. Le prix est élevé pour une seule nuit, mais tu t'en moques : tu veux te doucher, être propre, perdre la couche de poussière imprégnée dans ta peau, tes cheveux.

La réceptionniste est étonnée de ton arrivée. Elle fait les choses à l'ancienne : elle photocopie tous tes papiers, téléphone pour savoir comme enregistrer un étranger. Cela dure, mais tu as finalement droit à ta douche. Froide, mais au combien agréable.

Le soir, tu arrives difficilement à lire les emails des deux derniers jours. Tu apprends que les goupilles n'ont pas pu partir. DHL limite désormais ses expéditions aux seules entreprises... Vite, tu trouves grâce à Bob une destination « professionnelle » sur Yakutsk. Malheureusement, le décalage horaire fait qu'il sera trop tard pour que l'envoi ait lieu ce vendredi. Ce ne sera que pour lundi prochain. Tu n'as décidément pas de chance avec les questions d'expéditions.



Samedi 21 juin 2014

La route commence par une section goudronnée de 100km. Incroyable... Tu ne cherches pas à comprendre, et tu en profites. Surtout ne pas aller trop vite pour bien savourer. La suite sera comme la veille : une succession hétérogène de bonnes, mauvaises, très mauvaises pistes.

Souvent des camions en panne. La vie de chauffeur routier est dure dans la région. Ils ont beau te recouvrir de poussière, tu respectes ces hommes. Tu les salues quand tu les croises.

Tu t'arrêtes souvent pour nettoyer ta visière, pour prendre un café. A chaque fois, des serveuses, des chauffeurs viennent à toi pour te questionner. Magadan ? Niet v'Chukotkou.. Ces chauffeurs sont bien placés pour savoir que la route du Chukotka n'existe pas. Du moins en été. Alors tu leur expliques : « Le bateau sur la moto, puis la moto sur le bateau. Lodka na motocyclé, potom motocycle na lodké ». Parfois tu leur montres la vidéo. Comme ton Russe est trop limité pour dire « j'essaye d'aller aussi loin que possible vers l'Alaska », tu simplifies : « je vais en Alaska ». Tu te dis que la rumeur va se répandre.. Tous ces gens qui pensaient être sur la route de Magadan découvrent qu'ils sont en fait sur la route Paris-New York. Peu importe jusqu'où tu iras : la route existe désormais. La preuve : ils ont vu un Français qui passait par là pour se rendre en Amérique. Sur leur route!

La bonne nouvelle de la journée : plusieurs personnes t'ont confirmé que la route de Magadan ne présentait pas de difficulté particulière. Pas vraiment pire que celle-ci... en tout cas classique pour les 4x4 ou les motos. Et de l'essence régulièrement. A Vladimir, près de Moscou, Alex t'avait dit que cette route était impossible l'été, et que tu ne trouverais pas d'essence, ou alors à un prix fou. La Russie est tellement grande que personne ne peut être bien informé de l'état des routes de l'autre coté du pays.

Les 100 derniers kilomètres sont, comme hier, difficiles. Soleil rasant, l'ombre des arbres, et surtout des travaux sans interruption. Tu as chaud, tu ne vois rien, tu es épuisé. Tu as conservé ton pantalon de pluie pour protéger ton pantalon de route de la poussière. Mais tu baignes dans ta sueur. Un sauna.

30km avant l'arrivée, tu décides de t'arrêter en plein chantier. Voilà une demi heure que tu attendais un lieu plus accueillant, mais il te faut nettoyer ta visière. Tout devient trop dangereux. Un homme sur un engin de chantier arrête son moteur et vient te proposer un masque à poussière. Les camions se suivent, et le sable se transforme en poussière. Plus tu approches de l'arrivée, plus les zones de sable se font fréquentes. Tu étais heureux de faire de la piste, mais tu souhaites maintenant retrouver au plus vite le goudron. Lui seul t 'épargnerait la poussière.

La piste ne mène pas à Yakutsk mais à une petite ville de l'autre coté du fleuve Lena. Un fleuve comme on n'en connait pas en Europe. Des kilomètres de large... Une mer intérieure. L'hiver, la route se poursuit sur le fleuve. L'été, il faut prendre des bacs. La traversée dure une bonne demi-heure. Avant de partir tu te demandais si tu utiliserais ton bateau pour cette traversée, mais tu es tellement fatigué que tu n'envisages plus cette solution une seule seconde.

Sur le bac, des Russes de Lettonie viennent te parler. Ils ont déjà bien abusé de la vodka. Des chauffeurs aussi à qui tu expliques à nouveau ton projet. Personne ne te dit « impossible ». Tu sais d'ailleurs que c'est possible. Juste compliqué pour un motard seul.

Tu observes l'eau. Près des rives, le fleuve charrie beaucoup de morceaux de bois. Ce ne serait pas très bon pour ton bateau pneumatique, ni pour ta courroie... D'ailleurs, tu ne vois aucun pneumatique sur le fleuve. Il y a bien des petits « hors bord », mais jamais en pneumatique. Tu penses au Kolyma. Deux fleuves qui doivent se ressembler. Si tu trouves un bateau-bac sur le Kolyma qui descend jusqu'à Zyrianka puis Aniusk, tu le prendras.

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