La Bolivie des Boliviens ICON_SEP Print ICON_SEP

 

Dimanche 20 Février 2011

 

Toujours une route grandiose. Il faudrait que vous le répétiez toutes les cinq minutes. Tu te dis que tu traverses probablement les plus beaux paysages du monde. Mais le temps est toujours gris, et vous ne vous arrêtez pas pour les photos.

 

Une pause déjeuner après une cinquantaine de kilomètres. Vous profitez d'une éclaircie et descendez sur les berges d'une rivière. Alors que vous préparez du thé, un homme, assez âgé, traverse la rivière. Il vient vers vous. Il vous offre quelques pommes et vous partagez votre petit déjeuner avec lui. Vous êtes contents de cette rencontre. Jusque là, vous sentiez les Boliviens plutôt réservés. Une discussion simple.

 

Vous reprenez la route. La route, une vraie route goudronnée a remplacé la piste. Auras tu encore des pistes dans ton voyage ? Celles du Sud de la Bolivie étaient elles les dernières ? Rouler sur piste est si agréable...Il faudra que tu en trouves en Amérique du Nord.

 

Vous arrivez tôt à Potosi. Potosi est un choc. Vous arrivez par le Sud où se trouve un énorme terril. Une verrue qui déforme la moitié de la ville. Une ville en pente. Finies les maisons en toit de chaume et en terre séchée. Ici, toutes les maisons sont en brique industrielle, sans revêtement. Une couleur sale. Des ordures un peu partout aux abords de la ville.

 

Les habitants ressemblent à ceux que vous croisiez jusque là, mais ils sont nombreux. Les femmes portent toujours le chapeau et la jupe qui part à l'horizontale depuis la poitrine. Les hommes semblent toujours aussi pauvres. Mais c'est la première grande ville que vous découvrez. Une ville densément peuplée.

 

Une ville minière. Tous les guides expliquent que l'attraction principale est la visite de la mine. Une vraie mine souterraine, mais une mine du dix neuvième siècle. Revivre Germinal aujourd'hui. L'idée de cette visite te laisse un goût amer. Cela ressemble trop à du voyeurisme. Mais les mines restent un sujet qui te touche particulièrement. Tu vas y aller.

 

Vous traversez la ville en demandant régulièrement votre chemin. A plusieurs carrefours, des manifestants bloquent la circulation mais laissent passer vos motos. Ils expliquent à Loïc qu'ils protestent contre l'augmentation du coût des transports.

 

Arrivés à deux ou trois cent mètres du but, un jeune homme vous annonce que vous ne pourrez pas visiter aujourd'hui : c'est Dimanche... Il vous conseille de rester, de participer à la fête qui se prépare pour ce soir. Qu'en pense Loïc? Comme toi, il trouve cette ville sordide. Non, vous préférez avancer et vous rendre sur Oruro. Tant pis pour Germinal.

 

Vous repartez vers le Nord. Vous croisez des hameaux de plus en plus nombreux. Le désert est définitivement derrière vous. Mais ces hameaux, ces villages semblent en grande partie abandonnés. Sur dix maisons, cinq sont sans toit, et trois autres restent habitables, mais elles sont inhabitées... L'exode rural fait des ravages.

 

Vous apercevez Oruro en fin d'après midi. De loin, car l'Altiplano est maintenant une grande plaine, parsemée de colline ou de petites montagnes. Oruro est une grande ville. Encore plus grande que Potusi. Une ville minière aussi, même si vous n'apercevez pas les traces des mines.

 

Vous trouvez un hôtel au centre ville, et ressortez vite pour profiter de la fin de journée. Le carnaval, célèbre, ne commence que dans une semaine, mais la ville est déjà en fête. Une répétition générale pour le carnaval. Partout la foule. Une foule dense. Vous rencontrez plusieurs processions de danseurs. Des jeunes danseurs, accompagnés par des orchestres, des fanfares... Vous traversez aussi un long marché. La plupart des vendeurs semblent venir de la campagne alors que déambulent des citadins bien habillés. Des jeunes à la mode. C'est la première fois que vous côtoyez la Bolivie moderne. Tu pensais qu'elle n'existait pas.

 

La ville est aussi bien plus jolie que Potosi. Certains bâtiments ont de belles façades...mais c'est loin d'être la majorité. Vous marchez longtemps, toujours baignés dans une foule dense, joyeuse. Autant Potosi vous inquiétait par sa laideur, autant Ororu vous plait par son allure festive. Mais peut être auriez vous eu une autre image de Potosi en arrivant plus tard.

 

A la tombée du jour, vous rentrez dans un petit restaurant de quartier pour diner. Vous discutez avec Loïc. Il y a beaucoup de choses que vous ressentez de la même façon. Théoriquement, il ne lui reste plus qu'un mois de voyage et il commence à décompter les jours. Un décompte douloureux. Tu n'y penses pas encore, mais tu lui avais dit que tu aurais aimé rentrer dans ton village comme tu es parti : en moto. Il y a repensé, et lui aussi : il ne se voit pas débarquer du TGV à Pau. D'un coup, tu réalises aussi la difficulté de cette arrivée. Tu te projettes dans le futur, fin Juin. Non, il faudra que tu envoies Toeuf Toeuf par avion depuis Montréal. Jusque là, il était acquis qu'elle voyagerait par bateau pour faire des économies. Tu auras trop besoin d'elle au retour. Arriver en moto, c'est un peu fanfaronner, mais c'est aussi rester voyageur quelques temps. Alors qu'arriver en TGV, et prendre le bus... Tu aurais l'air gauche, pitoyable, comme l'Albatros au sol. Tu sais qu'au retour, tu auras besoin de caresser le réservoir de temps en temps. D'écouter les bruits du moteur. Et de rouler un peu.

 

Tu ne sais pas jusqu'à quand vous voyagerez à deux avec Loïc, mais votre cohabitation se passe bien. Vous vous quitterez probablement quelque part au Pérou. Quand vous aurez l'impression de vous répéter les mêmes choses. Ou que l'un d'entre vous aura envie d'être seul. Ou que, simplement, vos destinations divergeront. Vous verrez bien... Dans tous les cas, vous vous retrouverez plus tard, en France.

 

Vous rentrez à l'hôtel. Il n'est que neuf heures, mais la fête semble se terminer... Vous retraversez le marché. Les vendeurs se dépêchent de plier leur étalage. La foule se disperse. Les retardataires accélèrent le pas pour rentrer chez eux. La vie nocturne est intense, mais brève. Beaucoup plus brève qu'au Chili ou qu'en Argentine.

 

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Lundi 21 Février 2011

 

Vous faîtes route sur Copacabana. Vous avez décidé de sauter l'étape « La Paz ». La route est monotone. Du moins, vous la trouvez monotone par rapport aux paysages que vous aviez traversés ces derniers jours. Et le temps est toujours morose.

 

Vous apercevez de nombreux écoliers sur les routes. Les vacances sont terminées. Le Lundi de la rentrée... La fin de l'été. Il est temps pour toi de t'approcher de l'Equateur pour changer d'hémisphère.

 

Vous ne traversez pas La Paz, mais approchez par le sud cette grande capitale perchée à plus de 4000 mètres avant de repartir à l'Ouest, dans la direction du Lac Titicaca. La route traverse une banlieue interminable. L'air est saturé de gaz d'échappement. Il te semble que la bruine qui tombe te pique les yeux. Comment peut on vivre dans un enfer pareil ? En tout cas, vous décidez d'en sortir pour prendre votre déjeuner plus à la campagne.

 

Une cinquantaine de kilomètres plus loin, un panneau indique un site archéologique situé dans un petit village : Tawanaku. Vous vous y rendez et découvrez un charmant village. Alors que vous déjeunez dans un restaurant, vous apprenez en lisant vos guides que vous êtes sur le site archéologique le plus important de Bolivie. Le hasard fait bien les choses.

 

Vous allez donc faire une visite imprévue de musée et de ruines. Des ruines beaucoup plus sophistiquées que celles que tu avais vues jusque là. Les jointures des pierres sont belles. Plusieurs statues ont, paraît-il, servi de modèles à Hergé pour « Le Temple du Soleil ».

 

Repartis, vous arrivez peu après à … un poste frontière. Cela aussi était imprévu. Depuis un moment, tu voyais sur ton GPS que vous longiez le Sud du Lac, vers le Pérou. Mais vous faisiez confiance à la route tracée par le GPS de Loïc, bien plus perfectionné que le tien. La route tracée va effectivement à Copacabana, mais par un rapide transit au Pérou. Cette solution ne te convient pas, car deux passages de frontières signifient 4 tampons supplémentaires sur ton passeport. Loïc terminera la route, et tu reviendras en arrière pour atteindre Copacabana par le Nord. Retour à La Paz, et environ 200km pour rien. Loïc est désolé pour toi, mais tu n'es pas à 200 km près.

 

Le détour est long : Toeuf Toeuf a du mal dès que vous cotoyez les 4000m. Les 60 derniers kilomètres sont une succession de virages. La nuit tombe vite, et ton éclairage est défaillant. La tôle ondulée de ces dernières semaines a cassé le cadre plastique tout neuf de ton bloc phare qui tient, à nouveau, avec des liens en nylon. Un éclairage qui bringuebale...

 

La route du Nord mène à un petit village : Tiquana, d'où il faut prendre des barges en bois pour poursuivre la route. Tu es content de voir que les barges circulent de nuit, et tu t'engages sur la première. Des planches se croisent et tu suis l'une d'elle jusqu'au fond de la barge. Ne surtout pas tenter de poser un pieds... car les trous sont presque aussi nombreux que les planches.

 

La barge démarre dès qu'un autre véhicule a embarqué. Une traversée pour deux véhicules... et tu ne pays qu'environ un euro. Tu tiens solidement le guidon pendant la traversée pour éviter un basculement. Heureusement, les eaux du lacs sont calmes.

 

Arrivés de l'autre coté, à San Pedro, le conducteur de la barge t'aide à sortir Toeuf Toeuf en marche arrière. Pas évident... et tu souffles comme un boeuf. Tu n'es pas encore complètement acclimaté à l'altitude.

 

La fin de route jusqu'à Copacabana est une interminable succession de virages et de lacets, mais la chaussée est équipée de réflecteurs qui t'aident bien dans ta conduite. La plus belle route Bolivienne que tu auras pratiquée. Tu n'as aucun mal à trouver l'hôtel « Wendy Mar » où Loïc t'attend. C'est Claire et Dan, que tu avais rencontrés en Mongolie, qui t'avait donné le nom de cet hôtel où les petits déjeuners seraient succulents. Mais point de petits déjeuners en basse saison... Dommage!

 

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