Histoires de frontières Print
Written by toi   
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Lundi 30 août 2010

 

Tu arrives au poste frontière peu après l'ouverture, vers 9h20. Tu es prêt à prendre quelques notes afin de raconter un passage de frontière.

 

Devant la première barrière, tu vois une file de 4 ou 5 camions. Les camions ont généralement des files distinctes, et tu doubles ce petit monde tout en réalisant qu'il y avait aussi quelques voitures coincées entre les camions... Tant pis! Tu auras peut-être gagné une heure. Tu demandes l'autorisation de rentrer au premier policier que tu vois. Tu vas te garer derrière la dernière voiture. Elle est immatriculée en Russie. Les autres sont, tu crois, toutes immatriculées en Mongolie.

 

Quelques jeunes femmes, dont une en mini-jupe, passent te demander si tu as besoin de changer de l'argent. Non merci.

 

Il y a une dizaine de voitures devant toi. Bloquées. Le Russe discute avec un policier. Ils semblent bien se connaître. Au bout d'un moment, il démarre, sort de la file, double tout le monde et passe la seconde barrière. Il doit être de la famille.

 

Une dizaine de minutes plus tard, tout le monde démarre son moteur : on va laisser passer quelques véhicules! Un policier vient te voir. Il te dit de dépasser les voitures pour rentrer. Tu ne te fais pas prier. Quatre ou cinq voitures rentrent, et toi derrière. Commencent les formalités « coté Mongole ».

 

Tu passes au guichet près de la barrière. On te donne un formulaire de couleur à remplir. Tu le remplis et attends ton tour pour accéder au guichet. Il faut présenter la carte grise et le passeport. Les files d'attente en Mongolie sont un peu théoriques : le dernier arrivé essaye toujours de passer en premier. Il s'approche et tend ses papiers. Il ne faut pas s'en offusquer. Juste garder un bras tendu et bien occuper le terrain avec les épaules.

 

Après avoir laissé passer plusieurs personnes, tu arrives à te faire enregistrer. Depuis l'Iran, le bakchich à toutes tes dernières frontières était demandé au premier enregistrement du pays que l'on quitte. Pas de demande ici... donc pas de bakchich coté Mongol. C'est bien!

 

Tu peux poursuivre. Tu te gares derrière la file suivante et rentres dans le bâtiment principal. A l'entrée un guichet. Tu attends ton tour. On te donne un nouveau formulaire.

 

Tu ne vas pas tout raconter... mais quand tu sors de ce bâtiment, tu as laissé ton formulaire de douanes d'entrée, et tu as une bande de papier qui comporte quatre coups de tampons et une signature. Obtenus après autant de files d'attente. A chaque fois, la personne a enregistré les informations te concernant, et aussi celles de Toeuf-Toeuf : numéro de chassis, plaque, année de mise en circulation, etc... L'enregistrement est souvent double : informatique et dans des registres papier.

 

Les personnes aux guichets, toutes en uniformes sont souvent des femmes. Elles sont toutes gentilles et particulièrement patientes avec toi. Elles t'indiquent à chaque fois quel sera le guichet suivant. Elles ont l'air de bonnes mères de familles.

 

Après une petite heure dans ce bâtiment, tu peux passer à l'étape suivante. La dernière avant de quitter la Mongolie. Un policier vérifie quand même que tu as bien tes tampons sur ton papier. Tu roules jusqu'à la barrière suivante. Là, un jeune policier prend ton papier tamponné et vérifie à nouveau ton passeport. Il reprend chaque page trois fois de suite... Il te manque un coup de tampon! Il a l'air bien embêté. Il te fait faire demi tour, et vous retournez ensemble au bâtiment principal. Là, il salue respectueusement un supérieur. On appelle le policier qui avait vérifié tes tampons. Il en prend pour son grade. Il avait bien compté les coups de tampons sur le formulaire, mais avait oublié de vérifier celui du passeport. Faute grave!

 

Donc retour à l'intérieur, et l'ensemble des policiers effectue ton contrôle de passeport. A nouveau les choses paraissent compliquées. Ils sont trois mais n'y arrivent pas. Tout le monde te regarde, un peu gêné... Le guichet d'à coté est tenu par un officier. Il va prendre les choses en mains, et, effectivement, il finit par réussir à faire ce qu'il fallait sur son ordinateur. On te rend ton passeport après lui avoir rajouté le fameux coup de tampons manquant.

 

Tu peux remonter à la dernière barrière, avec le jeune policier. Là, il revérifie pour la forme l'existence du coup de tampon qu'il vient lui même de rajouter. Il te rend ton passeport ainsi que ta carte grise. Tu pourras rentrer en Russie. Après la file de voitures qui est devant toi!

 

Tu passes en Russie vers 11h30. Coté Russe, les choses sont plus simples, mais pas plus rapides. Tu te gares derrière la file de voitures et passes au premier guichet. Après vingt minutes, on s'occupe de toi. La policière est bien suspicieuse quand elle te compare à ta photo sur ton passeport. Elle s'y reprend à cinq fois, et tu crains qu'elle t'annonce que tu n'es pas toi. Tu as du maigrir, et tu n'as plus de lunettes... mais un détail doit la rassurer. Elle finit par te reconnaître. Elle te sourit. Tu lui fais aussi un grand sourire.

 

L'étape suivante est la douane. Il y a une dizaine de voitures devant toi. Il faut environ un quart d'heure par voiture... Tu n'oses pas faire la multiplication. Une charmante douanière vient te voir et te proposes de doubler la file de voitures. Tu lui obéis avec empressement.

 

Tu peux rentrer dans le bureau des douanes. Tu en ressortiras une bonne demi-heure plus tard. Les formulaires étaient en Russe, et on t'aura bien aidé pour les remplir. A nouveau, tout le monde est bienveillant avec toi. On te fait ouvrir tes caissons pour la forme, et on te montre la sortie!

 

Voilà... tu peux quitter la douane, et montrer ton passeport tamponné à la dernière barrière. Il est 13h. Non, 14h car tu as à nouveau changé de fuseau horaire. Pourtant, tu n'as fait que monter vers le Nord. Moins de quatre heures pour passer une frontière. Pas mal! Et aucun bakchich!

 

En France, tu aurais hurlé si une formalité administrative t'avait demandé plus d'une heure. Mais depuis que tu passes les frontières, tu as appris à être patient et fataliste. Il faut le temps qu'il faut.

 

Tu prends la route vers Ulan Ude. La Russie et la Mongolie ne se ressemblent pas. C'est un peu comme passer du Mexique aux Etats-Unis. On voit toujours beaucoup de Mexicains – ici de Mongols- mais les routes, les signalisations, les bâtiments, tout change. Et les forêts font leur apparition.

 

Le premier restaurant que tu trouves est après 120km. Il est plus de 3h de l'après midi, et tu es le seul client. Tu arrives à commander un steak-frites. En Russie comme en Mongolie, il est rare de trouver quelqu'un – en dehors des grandes villes - qui connaisse deux mots d'Anglais. Il te faut donc parler avec des gestes, ou faire des dessins. Tu y arrives d'autant plus facilement que tu as faim.

 

La serveuse démarre la chaîne stéréo. Le tube de l'été : « Ca m'énerveee... ». Tu avais dansé avec tes enfants sur ce morceau avant de partir. Les paroles sont bien trouvées, mais tu n'imaginais pas que cet air puisse devenir un tube planétaire et arriver aussi vite dans cette petite ville du Sud de la Russie.

 

Tu repars sur Ulan Ude. Il fait doux. Un grand ciel bleu. Tu y arrives rapidement, prends une chambre d'hôtel pour deux nuits. Tu veux te reposer avant de te lancer sur les grandes distances sibériennes. Il faut aussi passer du temps sur internet, et vidanger ton huile moteur. La même depuis Barunturuu, après la baignade en rivière.

 

Mardi 31 Août 2010

 

Avec cette météo clémente, Ulan Ude paraît la douceur même. On en oublierait les -30°C ou -40°C de l'hiver.

 

La ville est étendue. Elle est célèbre comme carrefour ferroviaire. C'est ici que les deux branches du trans-sibérien se séparent : l'une vers Pékin, et l'autre vers Vladivostok. La voie ferrée traverse la ville en son centre. On ressent l'importance stratégique de cette fonction. Probablement l'un des noeuds ferroviaires les plus importants au monde.

 

Tu trouves la population étonnamment jeune. Peut-être es tu devenu particulièrement âgé, mais tu ne vois presque que des étudiants, ou des personnes en âge de l'être. Les personnes d'origine Mongole sont très largement majoritaires. Mais l'intégration est plus effective qu'à Almaty. Tu croises fréquemment des groupes mixtes, et tu vois indifféremment des Russes d'origine Européenne ou Mongole à toute fonction. Les caissières, les réceptionnistes, partout, la mixité semble s'être imposée. Les publicités sont aussi bien travaillées. Parfois des photos de visages dont tu ne saurais dire si ils sont plutôt Mongoles ou plutôt Européens.

 

Ta chambre d'hôtel est soviétique : agréablement vieillotte... Tu y retrouves l'ingéniosité russe. Dans la salle de bain, un seul robinet central permet d'alimenter au choix la douche ou le lavabo. Dans la chambre, un poste de radio. Il n'a qu'un seul potentiomètre, pour régler le volume. Donc pas besoin de se fatiguer à régler le tuner : celui-ci est pré-réglé, probablement sur « Radio Moscou ». C'est tellement plus simple.

 

L'hôtel est proche de la place Lénine. Au milieu, trône une statue géante : la tête de Lénine. Elle doit être si lourde, qu'elle y restera encore longtemps. Dans les républiques d'Asie Centrale, les bustes de Lénine ont tous été retirés. Ici, on n'en éprouve pas le besoin. Cela donne un petit air de nostalgie.

 

Tu vas faire ta vidange dans une station service. Les motos sont rares à Ulan Ude, et les mécaniciens sont contents de t'aider. Tu avais aussi des vis à resserrer, mais tu gardes cela pour plus tard. Tu seras content de faire des pauses sur la longue route qui t'attend pour la semaine qui vient.

 

Pour Internet, tu passes beaucoup de temps avec la charmante dame du « business center ». Deux heures pour essayer de faire fonctionner le WIFI, mais vous abandonnez. Heureusement, vous finissez par arriver à configurer la liaison Ethernet. Tout cela pour qu'elle te facture deux euros et demi.

 

Bien agréable cette pause à Ulan Ude.

 

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