Résumé du voyage ‟ Bering 2014 ” Print
Written by toi   
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Déjà deux mois que tu es rentré. Tu regrettes désormais que le voyage n’ait pas duré. En partant, tu savais ce voyage insuffisamment préparé. Tu avais commencé deux ans plus tôt à y travailler, mais il t’aurait fallu plus de temps. Comme tu avais obtenu les autorisations (Propusk) nécessaires pour le Chukotka, que le prototype de bato-moto commençait à bien fonctionner, tu t'es lancé, pour aller le plus loin possible dans une reconnaissance. Peut être jusqu'en Alaska. Peut être n'aurais-tu pas atteint la Russie avec tout ce chargement. Tu es allé plutôt plus loin que tu ne l'espérais.

Avant d'oublier, voici un résumé les principales informations collectées durant ce repérage. Tu espères que ces informations t'aideront à aller beaucoup plus loin ene 2016. Tu divises ce voyage en 7 parties :

  1. France-Bouriatie (croisement entre M56 et M58)

  2. Route de Magadan (jusqu'à Seymchan)

  3. Descente du Kolyma (jusqu'à Aniusk/Bilibino)

  4. Traversée du Chukotka (de Bilibino à Egvekinot)

  5. Côte sud (d'Egvekinot à Providenyia)

  6. Détroit de Bering (Providenyia à Nomes)

  7. la suite....



Au final, tu n'auras parcouru que les quatre premières parties. Mais tu as aussi collecté des informations précieuses sur les deux suivantes. Tu verras la suite la prochaine fois...

 

De France à la Bouriatie
Distance : environ 11000km
Durée : entre 2 et 3 semaines.
Période : fin mai.

Il s'agit à 99% de routes goudronnées plutôt en bonne état. Il y a certainement de trafic autour de Moscou, qui décroit au fur et à mesure que l'on s'en éloigne. Aucune difficulté notable.

Sur cette partie, les motoclubs existent dans chaque grande ville, et l'entraide des motards est partout. Les rencontres sont le principal attrait du parcours qui est sinon d'une grande monotonie. En dehors du passage de l'Oural, la Sibérie occidentale est totalement plate. La route devient plus belle après Irkoutsk, surtout lors de la traversée des steppes de la Bouriatie (entre Ulan Ude et Chita). On y retrouve les paysages de Mongolie.

 

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Route de Magadan (jusquu'à Seymchan)
Distance : environ 3000km
Durée : environ 1 semaine (plus par temps de pluie).
Période : début juin

Une longue route de terre pour l'essentiel, qui n'a pas un grand intérêt. Il y a parfois quelques dizaines de kilomètres de goudron, mais ces sections sont rares et concernent surtout le premier tiers. D’ailleurs, ces premiers 1000km sont pénibles voire dangereux car la route est en chantier (réalisation d'une route goudronnée jusqu’à Yakutsk). Beaucoup de camions et beaucoup de poussière. Après Yakutsk, il n'y a pratiquement plus que des routes non goudronnées. Les Russes diraient des routes ‟ normales ”. Plutôt roulantes. Mais sur les deux cents kilomètres qui suivent Yakutsk, la pluie peut rendre les choses considérablement compliquées. Donc en cas de pluies importantes, le mieux est de s'arrêter et d’attendre pour laisser passer l'orage. Sur la seconde moitié, on apprécie beaucoup le relief après avoir parcouru autant de kilomètres en plaine.

Pour ce qui est des risques, le plus grand est de s’écraser sur un camion de chantier alors que l'on essaye d'en doubler un. Un risque mineur est de s'énerver après les moustiques, nombreux en cette saison.

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Descente du Kolyma (jusqu'à Aniusk/Bilibino)
Distance : environ 1100km de bateau
Durée : environ 2 semaines
Période : deuxième quinzaine de juin

Le Kolyma est un fleuve particulièrement régulier, parfaitement navigable. Des barges/péniches le parcourent. Sur l'ensemble de son cours, environ une trentaine qui transportent surtout du charbon. Il y a aussi des petits bateaux motorisés par des hors bords (généralement 30-40 CV) qui appartiennent à des pêcheurs, des chasseurs, ou encore aux habitants des quelques localités.

A mi-chemin, Zyrianka est la principale ville. Le port d'attache des barges. Les autres localités n'abritent que quelques centaines d'habitants, mais elles ont toutes un dépôt d'essence (octane 80 uniquement). Les endroits pour se poser et camper la nuit sont nombreux. Il y a aussi les cabanes de chasseurs. L'eau n'est pas particulièrement claire, donc une filtration est nécessaire.

La section Seymchan - Zyrianka est la grosse étape (500km). Il n'y a pas de 92 (indice d’octane) à Seymchan, seulement du 80. Ni dans aucune ville du Kolyma d'ailleurs. En revanche, on en trouve à l'intersection avant Seymchan.

Pour ce qui est de la navigation, peu de risques si ce n'est les morceaux de bois flottants ou échoués sur le fond. Le plus souvent, la profondeur ne dépasse pas quelques mètres. Il est préférable de circuler à deux bateaux et d’être préparé à gérer les crevaisons. Les morceaux de bois interdisent aussi d’avoir une courroie libre. Il faudra la protéger pour le prochain voyage.

Le courant est régulier (environ 2-3 nœuds), toujours porteur sauf sur la rivière Aniusk (la toute dernière section). Les principales difficultés sont donc les morceaux de bois, et l’autonomie en essence (500km).

A Aniusk, il faut revenir au mode ‟ moto ” pour rejoindre Bilibino qui se situe à moins de trois heures de routes. Une belle route (non goudronnée), facile et agréable.

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Traversée du Chukotka (de Bilibino à egvekinot)
Distance : environ 1100km de moto
Durée : environ 2 semaines
Période : autour de la mi-juillet

Le morceau le plus compliqué qu'il faut soit faire à plusieurs, soit être accompagné d'un camion. Pour ce voyage, tu as voyagé accompagné de deux camions et la moto a été portée sur exactement la moitié de la distance. Il ne devait pas y avoir plus de 80cm dans les rivières que tu as traversées en roulant, et ta moto était sans bagage.

Officiellement, la route n'ouvre que dans la deuxième quinzaine de juillet (en 2014, elle a ouvert exceptionnellement le 15 juillet, plus tôt que d'habitude). Cette ouverture officielle est moins liée à la hauteur d'eau dans les rivières (qui va toutefois décroître durant l'été), qu'au déneigement d'un col unique (col des soldats?) sur la fin du parcours. Or l'enneigement, compliqué à gérer pour les camions, devraient l'être moins pour des motos (à partir du moment où l'on est plusieurs, on doit pouvoir passer à pieds à la frontière entre roche et neige). Il est donc envisageable de partir avant l'ouverture officielle. Les principales difficultés resteront les rivières, hautes au mois de juillet, qui gênent beaucoup moins les camions.

Le nombre total de rivières est indéfini... En 2014, il y avait à la mi-juillet entre 50 et 100 passages avec plus de 20cm d'eau. Environ une vingtaine avec plus de 50cm d'eau. Au moins une dizaine avec plus d'un mètre d'eau. Peut-être trois ou quatre avec plus d'1m20. D'après Pavel, la hauteur maximum que l'on peut rencontrer est environ 1m50. Il y a eu un bras de rivière avec cette hauteur, mais sans aucun courant (donc facile à traverser sur bateau).

Il faut encore tenir compte du courant, et de la nature du sol. Les courants sont toujours assez forts, mais il ne s'agit pas non plus de torrents de montagne. On peut le plus souvent traverser à pieds sans difficulté (avec une combinaison sèche) au moins les rivières de moins de 50cm. Au-dessus d'1m, il conviendrait de s'assurer avec une corde (donc d'être plusieurs). Les combinaisons sèches sont aussi précieuses lors de ces traversées, même si l'eau n'est pas si froide.

Le fond de rivière est constitué de galets de taille régulière (pour une rivière donnée). Mais suivant la rivière, la nature des galets peut varier du gros gravier (voire du sable) à la pierre de 20-30cm. Dans les pierres, on rebondit un peu trop, et dans le sable, on s'enfonce rapidement. Sans aucune charge, la puissance de la KTM690 permet de tout passer tout dès lors que la profondeur le permet, mais avec 100kg de charge, beaucoup de rivières poseraient un souci, quelle que soit leur profondeur. Il faut soit les traverser à pieds, à plusieurs autour de chaque moto, soit les délester avant de traverser.

Pour les rivières les plus profondes (entre cinq et dix), il faudrait utiliser un bateau et coucher dessus les motos. Une alternative (plus rapide) serait d'emporter un packraft qui pourrait aussi servir (en mer) d'annexe à l'ensemble des bateaux.

Souvent, il suffit de suivre la rivière pour trouver un passage plus large mais moins profond. Les Kamaz ne se posent pas toujours les mêmes questions.

Une autre difficulté est l'essence. Il y a du 92 à Bilibino ainsi qu'à Egvekinot, mais strictement rien entre les deux. Aucune localité et l’on ne croise pratiquement personne. Pour des KTM690, il faudrait compter 60 litres par moto (1100km). Une solution serait de faire un premier aller-retour sur environ 200km avec 40 litres par moto pour créer un dépôt de carburant de 20 litres par moto, puis de revenir sur Bilibino refaire des pleins de 40 litres par moto. Lors du second voyage, on récupère alors les 20 litres, soit 50 litres pour les 900km restants (je suppose que l'on a consommé 10 litres sur ces premiers 200km).

A noter que les 90 premiers kilomètres ne posent aucun problème. Il y a ensuite une succession de rivières (40 cm puis davantage...), et la première ‟ grosse rivière ” (environ 1m20) est justement à 200km de Bilibino. Avec cet aller-retour, l’essence à transporter n’est alors que de 40 litres.

Les manipulations autour des rivières risquent de prendre du temps. C'est pourquoi il faut compter au moins 8 jours pour la totalité du trajet. Aucun problème d'eau potable (l'eau de ces rivières est très pure).

Un dernier souci : les ours. Ils sont réellement nombreux, mais a priori peu dangereux tant qu’on les embête pas : le bruit les fait fuir. Il convient toutefois de rester en groupe et d'avoir de quoi les éloigner (stick avec fusées, bombe lacrymogène, …). La nuit, ils ne s'approchaient pas des camions (ni de ma tente?), même lorsque la nourriture avait été laissée apparente. Le jour, on les voyait s'enfuir en courant à une vitesse impressionnante.

Cette partie de route est donc compliquée. Prévoir de l'huile pour vidanger en cas d'immersion d'une moto dans une rivière. Prévoir de quoi pêcher. Il ne faut pas bien longtemps pour attraper quelques kilos de poisson.

En cas de panne, quelques camions font ce trajet. Difficile de dire combien mais peut être un tous les 3-4 jours pendant la courte période d'ouverture de la route. A vérifier auprès de Pavel. Clairement, il est conseillé d’avoir un téléphone satellite (même si les Kamaz n’en ont pas).

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Côte Sud (d'Egvekinot à Providenyia)
Distance : environ 400 km de bateau
Durée : environ 1 semaine, avec les aléas de la météo
Période : fin juillet

Tu avais initialement prévu de passer par le Nord, mais les gardes-frontières et les douaniers sont basés à Provideniya. Il fallait donc passer par le Sud. Tu es arrivé à Egvekinot un peu tard, mais la traversée était encore faisable. Même si tu n'as pas dépassé Egvekinot, tu as pu glaner les informations qui te manquaient.

Tout d'abord, ne pas traîner... Plus on s'éloigne du solstice d'été, plus les vagues et le vent risquent d'être forts. Les accalmies sont plus durables au début de l'été.

Faire le plein d'essence à Egvekinot. Prendre le maximum car il n'y aura que du 80 à Provideniya. Pour ce qui est de la nourriture, on doit pouvoir en acheter dans les villages intermédiaires qui sont : Kenerguina, Enmilen, Nunlingran et Seriniki. Ces villages n'apparaissent pas sur Google Earth, mais ils ont chacun environ 300 habitants (Chukchis ou Eskimos).

Il y a une longue lagune sur 80km ouverte à chacune de ses extrémités à la sortie de la baie d'Egvekinot. Il est possible de la suivre en naviguant à l'intérieur de cette lagune. La baie est calme, puis cette lagune, et c'est pratiquement les premiers 200km qui peuvent être parcourus relativement facilement.

En sortie de cette longue lagune, une lagune-baie protégée à 50km, puis le village d'Enmilen. Puis Nunlingram à nouveau à 50km, Seriniki à 100km et enfin Provideniya à 50km.

Seriniki ne présente pas de lagune protégée.

Tu ignores à quoi ressemblent les plages. Le plus souvent, il serait préférable d'ancrer les bato-motos dans une baie-lagune protégée, et d'aller dormir sur les plages. Utiliser un packraft comme annexe. S'il fallait passer une période de mauvais temps, il faudrait sortir et porter les embarcations. Mais à nouveau, il convient d'être 3 ou 4 pour les porter.

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De Provideniya à Wales
Distance : environ 350 km de bateau par le cap Chaplino, 250km en le court-circuitant
Durée : 24h
Période : deuxième quinzaine de juillet

Quelques informations recueillies auprès de Russ, le propriétaire du ‟ Professor Khromov ”. Tout d’abord, il faut se méfier du cap Chaplino. Il t'a recommandé d'insister auprès des autorités pour quitter Provideniya par la terre, et remonter jusqu'à la baie à 30km au Nord. Là une zone protégée par les iles Yttygran et Arakamchechen. Si les autorités refusent, il faudrait rejoindre ce point par la mer, en passant au large du cap Chaplino. Donc 100km de plus, et surtout une zone de courant et de vagues.

Ensuite, remonter jusqu'à la hauteur de Lavrentiya, puis direction Wales en passant au Sud des îles Diomèdes. Eviter la Grande Diomède (Russe) qui n’est occupée que par des militaires. En revanche, le village de la Petite Diomède (USA) est un point de repli en cas de souci. L’accès est peu large, entouré de rochers. Juste une plage de galets sur trois ou quatre mètres…

Russ semblait plutôt optimiste sur la faisabilité de cette traversée. Les traversées du Bering sont rares, mais elles ont été effectuées par toutes sortes d'embarcations, toutes plus étranges les unes que les autres.

En pratique, une fois que l'on a quitté Provideniya, les autorités Russes interdisent de rejoindre le sol du Chukotka. Mais on pourrait toujours pouvoir évoquer le cas de force majeure si les choses tournaient mal. Avec le risque de gros soucis administratifs.

Il faut donc se méfier : du cap Chaplino, des morses, des militaires de l'île de la Grande Diomède, et surtout des vagues. Au mois de juillet, la mer peut être parfaitement calme. Il faut viser le bon créneau, et ne pas laisser filer le temps.

Un autre souci : les formalités coté Alaska. Il faudrait prévenir de son arrivée les gardes côtes et le bureau de l'Immigration (police des frontières). Il y avait jusqu'au 1er août un garde côte (Bureau de l'Immigration) basé à Nome qui pouvait se rendre par avion à Wales pour donner son coup de tampon (moyennant environ $500). Ce bureau est fermé depuis le 1er août, et il faut probablement prévenir le bureau d'Anchorage. Les frais doivent être bien supérieurs. A éclaircir. En cas de grand beau temps, il serait judicieux de longer la côte jusqu'à Teller. De là, une route mène à Nome. Les frais pourraient être inférieurs si l'officier prend cette route. Après Nôme, tu ne sais rien de plus que ce que tu savais déjà...

 

 

Moto et équipement

Tu étais vraiment chargé. Plus de 100kg de bagages, mais surtout mal répartis. Le bateau était posé sur un plan constitué des sacoches et de l'arrière de la moto, les sacoches étaient surtout remplies par les pièces pour la motorisation du bateau). Tes seuls vêtements de rechange tenaient dans un sac étanche de 5 litres contenu dans un sac plus gros qu'il partageait avec la combinaison sèche, le sac de couchage, la tente, et l'embase du moteur ‟ bateau ”.

Le gros souci venait de ce sac, perché au dessus du bateau. Il remontait trop le centre de gravité. La première conséquence était l'instabilité sur l'appui sur la béquille latérale. Il compliquait aussi la conduite. Mais avec l'habitude, tu as réussi à faire ce voyage sans chuter. Il n'en aurait pas été de même si tu avais du conserver ta charge dans la section ‟ Bilibino-Egvekinot ”.

La bonne surprise a été la solidité de la moto. Tu avais acheté un kit de renforcement du cadre arrière, et cela a tenu... Les seuls soucis furent mineurs : grosses fuites sur les joints spi de fourche, perte du bouchon du réservoir de frein arrière, et la casse des deux clignotants arrières à cause des vibrations. Tu t'attendais à de réels problèmes avec cette moto bourrée d'électronique, mais rien de tel.

Le bateau n'a été que très peu utilisé. Mais il a bien voyagé. Tout ton équipement est arrivé à Egvekinot dans le même état qu'au départ. Là encore, ce fut une bonne surprise. Tu avais correctement emballé l'ensemble dans des mousses légères qui ont évité les frottements.

Pourrais tu alléger pour le prochain voyage ? Si tu trouves des compagnons de voyage, certains équipement pourraient être mutualisés. Mais au total, cela ne concernera que 5 à 10% de la charge... Tu crains qu'il soit difficile de faire mieux. Peut être pourrais tu tout de même :

  • diminuer l'encombrement de l'embase et la placer dans l'une des sacoches pour rabaisser un peu le centre de gravité,

  • créer des rangements ‟ bas ” pour certains équipements (tente,...). Il n'y a malheureusement pas beaucoup de possibilités.

  • modifier une sacoche pour créer une ouverture latérale (retirer le bateau pour accéder aux sacoches prend trop de temps).

Au final, il y a beaucoup d'équipements qui ne t'ont pratiquement jamais servi, mais cela aurait été différent si tu avais descendu le Kolyma sur ton bateau, puis rallier Egvekinot sans l'aide des Kamaz. Il sera donc difficile de gagner du poids lors du prochain voyage.



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