Dimanche 27 Juin 2010

Le Dimanche matin, tu t'arrêtes à Thessalonique. Tu as envie de te poser, de soigner tes pieds, et de prendre un peu de temps tranquille. Pour écrire, pour faire un premier point après déjà une semaine de voyage. Tu as aussi envie de découvrir une grande ville.

Tu recherches un hôtel bon marché dans le centre. Tu t'arrêtes à l'hôtel Atlas car, devant, plusieurs motos sont stationnées. Le prix est effectivement modique : 30 euros avec salle de bain, ou 25 euros sans salle de bain. Tu choisis « avec », car tu dois aussi laver ton linge et l'étendre. L'hôtel est tenu par des motards, mais être motard n'est en rien exceptionnel à Thessalonique. Tu parles « moto » à l'accueil et l'on te propose d'aller voir dès Lundi un mécanicien. Tu es inquiet pour ton démarreur. Lorsque le moteur est bien chaud, le démarrage se termine par un choc. Peut-être une sorte de « retour de kick » dû à un retard à l'allumage. Tu n'en sais rien, mais tu as peur que ces chocs, qui sont apparus dès Mardi finissent à la longue par casser des dents, et que cela arrive dans les pays où tu ne pourras plus trouver de pièces détachées. Tu n'es pas pressé, et la patience permet la prudence.

Tu te promènes, en ménageant tes ampoules aux pieds. Tu es heureux de voir un centre ville. Thessalonique est une grande ville. Les périphéries des villes sont laides : de longues zones commerciales, avec des concessions automobiles. Tout cela bâti à coté de terrains vagues, parfois des décharges. Il semble que depuis 20 ans, la Grèce ait beaucoup investi dans l'habitat, puis dans l'automobile.

Dans les rues, les Grecs aiment à afficher le modernisme alors que le sous-sol de la ville regorge de vestiges archéologiques. Le centre ville est en chantier, pour la construction d'un métro, mais les zones ouvertes du chantier semblent bloquées par les fouilles. Chaque nouveau trou conduit à des ruines. Et ces ruines sont probablement vécues comme des complications inutiles, plutôt que comme des ressources.

  Serie 1/4  

Tu visites les églises. Elles sont particulièrement décorées. Pour simplifier, il y a deux sortes d'églises : les plus récentes à l'extérieur peint et décoré, et les très anciennes, à l'extérieur sobrement « byzantin », en briques apparentes. Pour ces dernières, il faut généralement descendre quelques marches pour y accéder, la ville ayant gagné quelques mètres en altitude depuis leur construction.

Mais tu aurais pu aussi citer les églises récentes construites sur les ruines d'une église byzantine. Un cas fréquent.

A l'intérieur, toutes les églises débordent de riches décorations, de peintures et de dorures. Les styles diffèrent d'une église à l'autre, mais la richesse est omniprésente. L'activité aussi, car à chaque fois, des hommes ou des femmes prient. Ou des cérémonies sont en cours.

Un Dimanche soir à 20h, les églises sont toutes dédiées aux mariages. Devant chaque porche d'église, une grosse voiture allemande attend les jeunes mariés. Un peu partout des bouquets de fleurs. Tu rentres dans les églises et personne ne fait attention à toi. Sauf quand tu éternues.

  Serie 1/6  

Tu croises de nombreux jeunes au centre ville. Nombreux sont aussi les établissements branchés. Mais tu es surpris par la proportion de jeunes filles : les jeunes hommes sont rares, et les filles marchent souvent en groupes. Tu te dis que cette ville a décidément beaucoup de charme. Rentré à l'hôtel, tu réalises que la télé et le football y sont pour beaucoup.

Au petit matin, tu sors prendre un petit déjeuner. En face de l'hôtel, une toute petite boutique qui semble vendre des pâtisseries. Le panneau indique « Delicious ». Tu y prends un café, et un gâteau au chocolat, le seul dont tu es certain qu'il ne contient ni fromage, ni autre mélange salé. Tu t'assois, et alors qu'elle range des nouveaux gâteaux qu'elle vient de recevoir, la vendeuse s'approche et t'en offre un. Tu es touché. Depuis une semaine, de nombreuses personnes t'ont déjà rendu service, ou t'ont offert quelque chose.

Tu réfléchis à ton problème mécanique. Tu as sur ton PC le livre de maintenance de la moto en format électronique. Tu étudies le schéma mécanique du couplage moteur-démarreur, mais tu ne trouves rien qui pourrait provoquer un choc... Une simple suite d'engrenages reliée à une roue libre, comme sur un vélo, directement placée sur l'axe du vilebrequin. Le problème vient donc d'un retour du moteur, et non du démarreur.

Tu as une idée : il s'agirait peut être d'une anomalie de carburation. Tu avais installé un filtre à essence de voiture entre le réservoir et le carburateur. Ce filtre est proche du moteur, et quand le moteur est chaud, l'essence se vaporise dans le filtre. Tu ne comprends pas ce qui se passe dans le carbu, mais tu crois que le montage du filtre perturbe l'alimentation, et provoque indirectement des retards à l'allumage. Tout cela est bien hypothétique, mais revoir le circuit d'alimentation est facile. Tu le ferais immédiatement, mais tu as besoin de vider ton réservoir d'essence avant de retourner le robinet. Ce n'est peut-être pas la chose à faire sur l'une des principales avenues de la ville.

Lundi matin.

Tu passes la matinée chez un électricien moto. Un premier garagiste t'a indiqué qu'il s'agit probablement d'un souci de bobine. L'électricien, pour voir le problème te demande de rouler, afin de faire chauffer le moteur. Tu en profites pour visiter la vieille ville, l'Acropole et pour faire quelques courses : une visière neuve et des filtres à essence 'papier'. Tu reproduis bien les chocs devant l'électricien, mais il ne s'explique pas le pourquoi. En tous cas, il ne croit pas à ta thèse du filtre, même s'il penche pour un souci de carburation. Il vérifie le circuit électrique, la bougie, mais ne trouve rien.

Un vieil homme passe pour faire remplacer la batterie de son scooter. Il parle Français. Son père, qui a lui même appris le Français en Asie Mineure (au Liban?), le lui a appris. Et depuis, il parle le Français, sans jamais être allé en France. De ton coté, tu as enfin retenu comment dire « Merci » (Ekaristo). Tu as aussi compris que ta moto est une « Toeuf-Toeuf », c'est à dire une TT.

Tu fais une pause déjeuner. Tu rentres dans un petit resto où l'on te propose un steak et une salade de tomate. Les tomates arrivent.. un plein saladier. Puis le steak, qui est au final une côte de boeuf. Les Grecs mangent trop, et toi aussi.

Vous allez finalement ensemble, avec l'électricien, chez un concessionnaire Yamaha. Ce dernier semble connaître le problème mais pense qu'il n'y a rien à faire, sauf attendre que la roue libre meurt sous l'effet d'un choc plus violent que les autres. Un philosophe pragmatique. La seule solution qu'il suggère, tu y avais pensé, consiste à éviter de redémarrer moteur chaud. Pourquoi pas... Il suffit d'aligner les pleins d'essence avec les pauses repas, pour attendre au moins 30 minutes après un arrêt. Jusque là, tu multipliais les arrêts pour reposer la mécanique et le bonhomme, mais il faudra s'adapter.

A nouveau, trois ou quatre personnes se seront mobilisées pour régler tes soucis. Tous ont retenu que tu allais en Mongolie. La Mongolie fait rêver.

Toi, tu retiens que les Grecs que tu rencontres sont tous plus que serviables.