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Russie (2)
Histoires de frontières PDF  ICON_SEP Print ICON_SEP  E-mail

Lundi 30 août 2010

 

Tu arrives au poste frontière peu après l'ouverture, vers 9h20. Tu es prêt à prendre quelques notes afin de raconter un passage de frontière.

 

Devant la première barrière, tu vois une file de 4 ou 5 camions. Les camions ont généralement des files distinctes, et tu doubles ce petit monde tout en réalisant qu'il y avait aussi quelques voitures coincées entre les camions... Tant pis! Tu auras peut-être gagné une heure. Tu demandes l'autorisation de rentrer au premier policier que tu vois. Tu vas te garer derrière la dernière voiture. Elle est immatriculée en Russie. Les autres sont, tu crois, toutes immatriculées en Mongolie.

 

Quelques jeunes femmes, dont une en mini-jupe, passent te demander si tu as besoin de changer de l'argent. Non merci.

 

Il y a une dizaine de voitures devant toi. Bloquées. Le Russe discute avec un policier. Ils semblent bien se connaître. Au bout d'un moment, il démarre, sort de la file, double tout le monde et passe la seconde barrière. Il doit être de la famille.

 

Une dizaine de minutes plus tard, tout le monde démarre son moteur : on va laisser passer quelques véhicules! Un policier vient te voir. Il te dit de dépasser les voitures pour rentrer. Tu ne te fais pas prier. Quatre ou cinq voitures rentrent, et toi derrière. Commencent les formalités « coté Mongole ».

 

Tu passes au guichet près de la barrière. On te donne un formulaire de couleur à remplir. Tu le remplis et attends ton tour pour accéder au guichet. Il faut présenter la carte grise et le passeport. Les files d'attente en Mongolie sont un peu théoriques : le dernier arrivé essaye toujours de passer en premier. Il s'approche et tend ses papiers. Il ne faut pas s'en offusquer. Juste garder un bras tendu et bien occuper le terrain avec les épaules.

 

Après avoir laissé passer plusieurs personnes, tu arrives à te faire enregistrer. Depuis l'Iran, le bakchich à toutes tes dernières frontières était demandé au premier enregistrement du pays que l'on quitte. Pas de demande ici... donc pas de bakchich coté Mongol. C'est bien!

 

Tu peux poursuivre. Tu te gares derrière la file suivante et rentres dans le bâtiment principal. A l'entrée un guichet. Tu attends ton tour. On te donne un nouveau formulaire.

 

Tu ne vas pas tout raconter... mais quand tu sors de ce bâtiment, tu as laissé ton formulaire de douanes d'entrée, et tu as une bande de papier qui comporte quatre coups de tampons et une signature. Obtenus après autant de files d'attente. A chaque fois, la personne a enregistré les informations te concernant, et aussi celles de Toeuf-Toeuf : numéro de chassis, plaque, année de mise en circulation, etc... L'enregistrement est souvent double : informatique et dans des registres papier.

 

Les personnes aux guichets, toutes en uniformes sont souvent des femmes. Elles sont toutes gentilles et particulièrement patientes avec toi. Elles t'indiquent à chaque fois quel sera le guichet suivant. Elles ont l'air de bonnes mères de familles.

 

Après une petite heure dans ce bâtiment, tu peux passer à l'étape suivante. La dernière avant de quitter la Mongolie. Un policier vérifie quand même que tu as bien tes tampons sur ton papier. Tu roules jusqu'à la barrière suivante. Là, un jeune policier prend ton papier tamponné et vérifie à nouveau ton passeport. Il reprend chaque page trois fois de suite... Il te manque un coup de tampon! Il a l'air bien embêté. Il te fait faire demi tour, et vous retournez ensemble au bâtiment principal. Là, il salue respectueusement un supérieur. On appelle le policier qui avait vérifié tes tampons. Il en prend pour son grade. Il avait bien compté les coups de tampons sur le formulaire, mais avait oublié de vérifier celui du passeport. Faute grave!

 

Donc retour à l'intérieur, et l'ensemble des policiers effectue ton contrôle de passeport. A nouveau les choses paraissent compliquées. Ils sont trois mais n'y arrivent pas. Tout le monde te regarde, un peu gêné... Le guichet d'à coté est tenu par un officier. Il va prendre les choses en mains, et, effectivement, il finit par réussir à faire ce qu'il fallait sur son ordinateur. On te rend ton passeport après lui avoir rajouté le fameux coup de tampons manquant.

 

Tu peux remonter à la dernière barrière, avec le jeune policier. Là, il revérifie pour la forme l'existence du coup de tampon qu'il vient lui même de rajouter. Il te rend ton passeport ainsi que ta carte grise. Tu pourras rentrer en Russie. Après la file de voitures qui est devant toi!

 

Tu passes en Russie vers 11h30. Coté Russe, les choses sont plus simples, mais pas plus rapides. Tu te gares derrière la file de voitures et passes au premier guichet. Après vingt minutes, on s'occupe de toi. La policière est bien suspicieuse quand elle te compare à ta photo sur ton passeport. Elle s'y reprend à cinq fois, et tu crains qu'elle t'annonce que tu n'es pas toi. Tu as du maigrir, et tu n'as plus de lunettes... mais un détail doit la rassurer. Elle finit par te reconnaître. Elle te sourit. Tu lui fais aussi un grand sourire.

 

L'étape suivante est la douane. Il y a une dizaine de voitures devant toi. Il faut environ un quart d'heure par voiture... Tu n'oses pas faire la multiplication. Une charmante douanière vient te voir et te proposes de doubler la file de voitures. Tu lui obéis avec empressement.

 

Tu peux rentrer dans le bureau des douanes. Tu en ressortiras une bonne demi-heure plus tard. Les formulaires étaient en Russe, et on t'aura bien aidé pour les remplir. A nouveau, tout le monde est bienveillant avec toi. On te fait ouvrir tes caissons pour la forme, et on te montre la sortie!

 

Voilà... tu peux quitter la douane, et montrer ton passeport tamponné à la dernière barrière. Il est 13h. Non, 14h car tu as à nouveau changé de fuseau horaire. Pourtant, tu n'as fait que monter vers le Nord. Moins de quatre heures pour passer une frontière. Pas mal! Et aucun bakchich!

 

En France, tu aurais hurlé si une formalité administrative t'avait demandé plus d'une heure. Mais depuis que tu passes les frontières, tu as appris à être patient et fataliste. Il faut le temps qu'il faut.

 

Tu prends la route vers Ulan Ude. La Russie et la Mongolie ne se ressemblent pas. C'est un peu comme passer du Mexique aux Etats-Unis. On voit toujours beaucoup de Mexicains – ici de Mongols- mais les routes, les signalisations, les bâtiments, tout change. Et les forêts font leur apparition.

 

Le premier restaurant que tu trouves est après 120km. Il est plus de 3h de l'après midi, et tu es le seul client. Tu arrives à commander un steak-frites. En Russie comme en Mongolie, il est rare de trouver quelqu'un – en dehors des grandes villes - qui connaisse deux mots d'Anglais. Il te faut donc parler avec des gestes, ou faire des dessins. Tu y arrives d'autant plus facilement que tu as faim.

 

La serveuse démarre la chaîne stéréo. Le tube de l'été : « Ca m'énerveee... ». Tu avais dansé avec tes enfants sur ce morceau avant de partir. Les paroles sont bien trouvées, mais tu n'imaginais pas que cet air puisse devenir un tube planétaire et arriver aussi vite dans cette petite ville du Sud de la Russie.

 

Tu repars sur Ulan Ude. Il fait doux. Un grand ciel bleu. Tu y arrives rapidement, prends une chambre d'hôtel pour deux nuits. Tu veux te reposer avant de te lancer sur les grandes distances sibériennes. Il faut aussi passer du temps sur internet, et vidanger ton huile moteur. La même depuis Barunturuu, après la baignade en rivière.

 

Mardi 31 Août 2010

 

Avec cette météo clémente, Ulan Ude paraît la douceur même. On en oublierait les -30°C ou -40°C de l'hiver.

 

La ville est étendue. Elle est célèbre comme carrefour ferroviaire. C'est ici que les deux branches du trans-sibérien se séparent : l'une vers Pékin, et l'autre vers Vladivostok. La voie ferrée traverse la ville en son centre. On ressent l'importance stratégique de cette fonction. Probablement l'un des noeuds ferroviaires les plus importants au monde.

 

Tu trouves la population étonnamment jeune. Peut-être es tu devenu particulièrement âgé, mais tu ne vois presque que des étudiants, ou des personnes en âge de l'être. Les personnes d'origine Mongole sont très largement majoritaires. Mais l'intégration est plus effective qu'à Almaty. Tu croises fréquemment des groupes mixtes, et tu vois indifféremment des Russes d'origine Européenne ou Mongole à toute fonction. Les caissières, les réceptionnistes, partout, la mixité semble s'être imposée. Les publicités sont aussi bien travaillées. Parfois des photos de visages dont tu ne saurais dire si ils sont plutôt Mongoles ou plutôt Européens.

 

Ta chambre d'hôtel est soviétique : agréablement vieillotte... Tu y retrouves l'ingéniosité russe. Dans la salle de bain, un seul robinet central permet d'alimenter au choix la douche ou le lavabo. Dans la chambre, un poste de radio. Il n'a qu'un seul potentiomètre, pour régler le volume. Donc pas besoin de se fatiguer à régler le tuner : celui-ci est pré-réglé, probablement sur « Radio Moscou ». C'est tellement plus simple.

 

L'hôtel est proche de la place Lénine. Au milieu, trône une statue géante : la tête de Lénine. Elle doit être si lourde, qu'elle y restera encore longtemps. Dans les républiques d'Asie Centrale, les bustes de Lénine ont tous été retirés. Ici, on n'en éprouve pas le besoin. Cela donne un petit air de nostalgie.

 

Tu vas faire ta vidange dans une station service. Les motos sont rares à Ulan Ude, et les mécaniciens sont contents de t'aider. Tu avais aussi des vis à resserrer, mais tu gardes cela pour plus tard. Tu seras content de faire des pauses sur la longue route qui t'attend pour la semaine qui vient.

 

Pour Internet, tu passes beaucoup de temps avec la charmante dame du « business center ». Deux heures pour essayer de faire fonctionner le WIFI, mais vous abandonnez. Heureusement, vous finissez par arriver à configurer la liaison Ethernet. Tout cela pour qu'elle te facture deux euros et demi.

 

Bien agréable cette pause à Ulan Ude.

 

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Route Sibérienne PDF  ICON_SEP Print ICON_SEP  E-mail

Mercredi 1er Septembre 2010

 

Tu quittes l'hôtel après un petit tour au « business center » pour une séance internet. Alors que tu charges ton sac, un homme, mal rasé, passe avec deux enfants. Tu as bien l'impression qu'il est Français. Peut-être son regard, son expression... Mais ses deux enfants ont l'air parfaitement russes. Des petites têtes bien blondes. Effectivement, il est de Castres, marié à une Russe. Il est en vacances, dans la famille de son épouse. Vous discutez un moment. Il est aussi motard. Il a déjà envisagé de venir en moto depuis Castres, mais il se croit trop vieux. Il a quarante quatre ans. Tu comprends.

 

Il imagine de nombreux problèmes possibles. Déjà la langue. Comment trouver son chemin ? Toi, tu es heureux de savoir que trouver son chemin n'est pas toujours immédiat. C'est souvent cela qui te permet de dialoguer, ou tout du moins d'avoir des contacts avec les gens. Lui comprend un peu le russe, et il sait le lire. Petit à petit, il réalise que ce voyage ne lui serait pas si difficile.

 

Tu aurais bien discuté davantage avec lui. Il t'aurait certainement beaucoup appris sur la Russie. Mais il a des choses à faire, et, toi, tu as 650km jusqu'à Chita, ton objectif de la journée.

 

Tu suis la route que l'on t'a indiquée, mais tu as quelques doutes. Tu vas trop à l'Ouest... Tu vérifies sur la carte. Non, c'est effectivement normal. Tu suis un cours d'eau qui contournes une petite montagne.

 

Tu t'arrêtes après une centaine de kilomètres pour prendre un café et une soupe. Tu as un peu froid. Tu inspectes Toeuf Toeuf. En roulant, tu as eu l'impression que quelque chose n'allait pas. Le bas moteur coté droit est plein d'huile. De l'huile a aussi éclaboussé ton caisson droit. Une grosse fuite d'huile ? Tu n'arrives pas à la localiser car l'huile est un peu partout. Ce pourrait être le joint du carter d'embrayage, ou, pire, le joint d'embase. A moins que ce ne soit juste le joint torique du bouchon qui recouvre le filtre à huile...

 

Tu sais que le mécanicien qui t'a aidé à faire la vidange a remis trop d'huile. Environ 2.6L au lieu de 2.3L. Mais tu n'avais pas pensé que cela pourrait engendré une telle fuite. Normalement, le surplus est éjecté sur le filtre à air. D'ailleurs, il est possible que l'huile présent sur le caisson provienne du dégorgement de ce filtre.

 

Tu décides de vider un peu d'huile par la vis de purge. Pas trop, car si tu en perds, tu vas vite en manquer... Tu repars, inquiet.

 

Tu t'arrêtes tous les 100km. Le niveau d'huile ne bouge pas, et la fuite semble s'être arrêtée. Tu ne comprends pas bien ce qui c'est passé, mais tu te sens progressivement rassuré. Peut être de l'huile passait elle par le filet de la vis de purge qui n'aurait pas été assez serrée ? Tu n'as pas de clé de 8 et tu serres cette vis approximativement, à la pince, sans forcer de peur de foirer le filetage. Plus de peur que de mal!

 

Tu continues, presque serein, en profitant davantage du paysage. Tu es surpris par sa diversité. Michel et Pascale t'avaient parlé d'une route monotone, mais tu es ravi par ce que tu vois. Des zones de plaines, de montagnes, de collines. De belles rivières, et des forêts. Des pinèdes, mais aussi des feuillus.

 

Le temps est moins réjouissant que ces derniers jours. Tu as du revêtir tes vêtements de pluie. Mais les zones de pluies ne durent pas. Elles alternent de manière équilibrée avec du gris, et du soleil. Tu peux sécher rapidement dès que tu as pris une averse.

 

Tu t'arrêtes pour déjeuner : déjà 14h. Au moment de payer (moins de deux euros), l'horloge du restaurant indique 15h20... Tu as, à nouveau, changé de fuseau horaire! C'est la deuxième fois en trois jours. Il va falloir t'habituer au décalage horaire.

 

Tu ne sais pas si tu atteindras Chita. Il reste encore quatre cent kilomètres. La route est plutôt bonne, et tu avances bien.

 

Tu arrives finalement vers 9h. C'est déjà bien tard pour chercher un hôtel. Tu ne trouves pas le centre administratif où les hôtels sont souvent regroupés. On te dirige sur un site 'hôtel-motel'. Ils ne proposent que des chambres doubles. Le prix est très élevé (70 euros), mais tu es bien fatigué et tu acceptes.

 

Tu considères souvent qu'il faut multiplier les prix par deux pour avoir un équivalent français. L'essence coûte 60 cents d'euro le litre, un repas dans un restaurant populaire entre 2 et 4 euros, un repas dans un restaurant plus luxueux entre 10 et 20 euros,... Ta chambre doit donc être « grand luxe ». Mais non...rien de particulier si ce n'est deux lits larges.

 

En Russie, les touristes sont tenus de déclarer où ils dorment. Un héritage de l'union soviétique. Les hôtels font les déclarations à la police, et les fiches d'enregistrement doivent être montrées aux barrages de police et à la frontière lorsque l'on quitte le pays. A la réception des hôtels, on te dit toujours que ces enregistrements sont « très importants ».

 

Mais tout cela est devenu théorique, anachronique. On ne voit presque plus de barrages de police. La plupart des guérites le long des routes sont abandonnées. Et la police des frontières ne vérifie plus les fiches d'enregistrement. Ils peuvent les demander, pour la forme, mais ne les regardent pas. Il suffit d'en avoir deux ou trois sur soi pour satisfaire le contrôle.

 

Peux-tu dormir chez l'habitant ou faire du camping sauvage et éviter ces hôtels ? Probablement. En tout cas, tu ne risques pas grand chose. Surtout que les endroits tranquilles pour planter la tente sans être vu ne manquent pas. Les villages sont rares, et, contrairement à la Mongolie, point de yourte entre les villages.

 

En attendant, tu vas avoir une nuit confortable, et tu prends un bon repas dans le restaurant associé à l'hôtel. Tu y observes les autres convives. Des gens aisés. Tu as l'impression que les différences sociales sont plus marquées qu'en France. Peut-être n'y fais-tu pas attention en France. Peut-être aussi que la différence de classe est mise en valeur par une différence d'époque. Les riches vivent selon les standards Européens de 2010. Ils roulent dans des grosses voitures Japonaises, souvent des 4X4. Les plus pauvres ont conservé le mode de vie « soviétique ». Ils roulent en vieux side-car ou en vieilles Lada. Leurs maisons en bois noirci par le temps n'ont ni salle de bains, ni toilettes.

 

A la réflexion, cette « fracture sociale » est commune à toutes les anciennes républiques soviétiques. Ou encore à la Mongolie. Mais la Russie ressemble davantage à l'Europe, et tu la trouves plus criante. A tort. Voir une dame blonde, élégante, habillée en Européenne, sortir d'un chemin de terre qui mène à des baraques en bois te choque davantage qu'une situation identique au Turkménistan ou en Mongolie. Tu es bien un occidental!

 

 

Jeudi 2 Septembre 2010

 

La prochaine grande ville, Khabarovsk, est à 2165km! C'est peut-être la distance entre Paris et Moscou...

 

La route est excellente. Souvent, des équipes travaillent à refaire des zones de goudrons, ou bien à installer des glissières de sécurité. Pascale et Michel t'avaient annoncé une route dans un état exécrable, mais le travail effectué depuis deux ans est impressionnant.

 

Tu croises un motard solitaire. Vous vous arrêtez pour papoter. Jaroslav est Tchèque, Praguois. Il est « journaliste-moto ». Il teste sa BMW 800 sur une longue durée : deux ans! Il a déjà roulé 120000 km la première année... Il s'intéresse aussi à ton voyage. Lui ne part que par périodes de trois mois. Le pauvre! Deux fois par an quand même.

 

Il connait bien l'Afrique du Nord. Il connait bien aussi la Russie. Il te donne des adresses, t'apprend que Vladivostok n'est pas le seul port de départ pour le Japon. A 200 km à l'Est de Vladivostok, Nakhenta est un port avec un départ quotidien. Et aussi un super « moto-club ». L'information t'intéresse car le bateau du Lundi de Vladivostok est contraignant : il oblige à arriver au plus tard le Jeudi qui précède pour pouvoir s'occuper des formalités douanières. Reste à valider que les occidentaux peuvent prendre ces bateaux... Tu feras une séance internet à Krasnaïorsk.

 

Tu repars, ravi de cette rencontre et t'arrêtes peu après pour déjeuner. Encore une matinée où tu n'auras presque pas roulé. Mais tu te rattrapes les après midi.

 

La route est toujours aussi bonne. Il fait beau. Malgré la distance, rouler est agréable. Jaroslav t'a appris que, trois jours plus tôt, Vladimir Poutine l'avait prise, seul. Il était dans une voiture particulière pour « contrôler » l'état de la route après d'importants travaux. Il avait roulé entre Khabarovsk et Chita. Une opération médiatique de trois jours. Depuis les incendies de juillet, il a besoin de montrer qu'il s'intéresse à la province. Tu comprends un peu mieux pourquoi la route est si bonne. Pourquoi autant de personnes y travaillent. La remise en état de cette route est un enjeu national.

 

Pourtant, les automobilistes sont rares. Tu croises parfois des voitures neuves, sans immatriculation, qui arrivent du Japon ou de Corée. Pour éviter de payer un transfert par train, des chauffeurs font les 5 ou 10 mille kilomètres en conduisant. Il y a aussi quelques side-cars ou des Ladas quand tu approches des villages. Et puis quelques poids lourds. Ceux ci sont soit chargés de voitures neuves, soit de matériaux ou d'engins destinés aux nombreux chantiers encore ouverts pour finaliser la route.

 

La route suit à quelques kilomètres de distance le tracé du trans-sibérien. On croise la voie ferrée de temps à autres. Mais tu as l'impression que, depuis les travaux, le tracé de la route a été optimisé. Parfois, des tranchées récentes découpent les crêtes des collines. Des gros travaux.

 

Tu ne t'arrêtes pas pour les photos. Pourtant, la lumière est belle, et les paysages mériteraient de nombreuses photos. Tu avances... Au passage d'un pont, où une équipe s'active sur l'un des derniers chantiers. Tu ralentis, et tu vois des journalistes. Un photographe s'intéresse à ce qui arrive sous le pont : un train de voyageurs! Tu n'oses pas le rejoindre. Tu aurais juste le temps car le train avance doucement. Dommage! Le train sortait d'un virage, et la photo aurait été idéale. Tu as tort d'être timide.

 

Le soir, tu demandes à une station service si il existe un hôtel dans les parages. Le prochain est à 150km, mais il y a une possibilité d'hébergement dans le village, à 200 mètres. Parfait. Un lit dans une minuscule chambre à 2 lits. Tu seras seul dans la chambre. Pas de lavabo.

 

 

Vendredi 3 Septembre 2010

 

Tu démarres plus tôt, vers 9h. Trop tôt car les brouillards ne se sont pas encore dissipés. La route suit les reliefs, et, dans chaque creux, tu es pris dans des nuages froids et opaques. Heureusement, le soleil ne tarde pas à les faire disparaître.

 

A une station service, tu essayes de te renseigner sur Nakhenta auprès de convoyeurs de voitures japonaises. Oui, il y a des gros ferryboats qui partent de ce port, mais tu n'en sauras pas plus. C'est difficile de poser des questions précises sans se comprendre.

 

Mais tout le monde cherche à t'aider. Parmi eux, une fille charmante et joyeuse, qui te croit perdu. Elle veut te sauver. Elle trace sur ta carte la route à suivre : tout droit pendant 3000 km.

 

Tu abandonnes l'idée de glaner des informations sur les départs depuis Nakhenta... et vous parlez de ton périple. Comme la fille est divorcée, et que toi aussi, ses compagnons ont dans l'idée de vous marier. Mais cela ne se fera pas : elle roule vers l'Ouest et toi vers l'Est. Aucun de vous deux n'accepte de changer de cap. Tu retiens que tu feras ton prochain tour du Monde dans le sens inverse.

 

Au moment de partir, ta fiancée te fait des grands signes d'adieu accompagnés de coups de klaxon déchirants. Tu as oublié de lui demander son prénom. Comme souvent, tu voudrais que les rencontres durent un peu plus longtemps.

 

Tu retournes à Toeuf-Toeuf. Le bloc « tableau de bord » est brinqueballant. Il ne tient plus que par le câble du compteur. Les vibrations des pistes en Mongolie ont émietté la protection plastique, précuite par le soleil. Elles ont ensuite eu raison des deux autres points de fixations, cassés. Tu essayes de l'immobiliser avec une sangle. Tu n'as pas pris le temps d'acheter du scotch solide avant ton départ. Le pompiste t'observes. Il arrive à la même conclusion que toi : tu n'y arriveras pas. Il va demander un rouleau de scotch à la caissière, et revient te l'apporter. La réparation tiendra bien jusqu'à Vladivostok. Si il ne pleut pas.

 

Tu roules. Tu ne t'arrêtes que pour les pauses obligatoires : essence, repas,... Les stations d'essence sont plutôt nombreuses, mais positionnées de manière irrégulière. Parfois, tu en vois trois sur 3km, puis plus rien pendant 180km... Tu ne te fais piégé qu'une seule fois. Mais tu as conservé ton jerrycan de 10L, et tu dois le sortir juste 1km avant la prochaine station! Au passage, tu as vérifié que, désormais, tu accèdes à la totalité, soit 20L, de la capacité de ton réservoir. Le changement de circuit et de filtre effectué par Staryi, à Barnaul a été efficace.

 

Tu as pris l'habitude de saluer les gens que tu croises sur le bord de la route. Souvent, il s'agit des ouvriers qui travaillent aux finitions de la route. Parfois, ce sont eux qui te saluent en premier... tu te demandes si ils ne se sont pas donnés le mot.

 

Le soir, tu aimerais bien trouvé une douche. Un nom de ville est indiqué à 87 km. Tu vas poursuivre jusque là. Arrivé sur place, la ville se limite à cinq ou six maisons en bois. Tu essayes de te renseigner... tu redémarres. 20 km plus loin, tu rentres dans un café. Il y a bien un hôtel, mais 50km plus loin. OK. Tu rejoins le lieu, mais l'hôtel est encore en construction. Le prochain hôtel est à 30km. Soit. Tu y vas. Un bâtiment récent, propre, moderne, avec une « cafétéria » bien équipée. Tu as un dortoir chambre à 6 lits pour toi tout seul et tu ne payes que 4 euros. Mais à nouveau, pas de douche! Il y a quand même un lavabo avec un tout petit filet d'eau dans la « cafétéria » attenante.

 

Pourtant, la région ne manque vraiment pas d'eau. Partout, des rivières, des étangs... Et toutes les maisons sont bien équipées en réseaux de radiateurs pour le chauffage. Mais point d'eau!

 

Une autre difficulté, pour toi, se situe dans les toilettes. Toujours ces trous cachés par des cabanes en bois. Les cabanes vont généralement par deux. Tu comprends que l'une est réservée aux dames, et l'autre aux messieurs. Tu ne cherches pas à comprendre laquelle t'est destinée. Tu rentres en apnée dans la première, et tu y restes aussi brièvement que possible. Tu essayes surtout d'aller dans la nature.

 

 

Samedi 4 Septembre 2010

 

Tu continues à rouler comme une brute. Tu auras fait 3000 km en quatre jours. Aujourd'hui, le temps est plus maussade, mais il ne pleut pas.

 

Il y a exactement 2165km entre Chita et Khabarovsk. A chaque kilomètre, un petit panneau bleu rappelle la distance déjà parcourue. Tu révises un peu l'histoire de France. Quand tu arrives dans les 19xx, tu commences à penser à l'histoire de la famille. Puis, après 1960, tu essayes à chaque kilomètre de retrouver un souvenir personnel... Tu as environ quarante cinq secondes pour chaque année qui passe. C'est la première fois que tu joues à ce jeu, et c'est bien intéressant. Tu revis ton enfance, ton adolescence. Tes études. La naissance de tes enfants. Ensuite, tu as plus de mal à retrouver des faits qui te concernent, et tu réalises que tes seuls repères sont liés à tes enfants. Et ainsi jusqu'à 2010, 2011... des années dont tu te souviendras longtemps.

 

Sur les deux cents derniers kilomètres avant Krasnaïorsk, la géographie change. Finies les grandes forêts, les espaces infinis. On se croirait (presque) en Europe. Et la densité de population augmente : des villages, des gens au bord de la route, des voitures,...

 

Khabarovsk est une vraie grande ville. Tu rentres dans le premier hôtel que tu trouves, même si il a l'air un peu luxueux. Tu voudrais, non seulement une douche, mais aussi internet pour récupérer les mails de tes enfants. Et il y a tout cela dans cet hôtel. C'est commun à tous les hôtels en Turquie, mais bien rare en Russie.

 

Une fois de plus, un décalage horaire. Le dernier pour longtemps, car tu es désormais à l'heure de Vladivostok (GMT+10), qui est aussi celle de Sydney. Et oui, tu es à l'Est!

 

Il faut vite que tu ailles dans le petit restaurant de l'hôtel avant sa fermeture. Là, deux hommes finissent leur repas. Ils te demandent d'où tu viens. Ils sont Allemands. Ils vendent des machines pour les mines de charbon. Encore les Mines! Ils travaillent ensemble, pour deux PME allemandes complémentaires, leaders sur le marché des haveuses de charbon. Des exemples de PME super performantes. L'une, 2000 personnes, construit la machine excavatrice, et l'autre, 140 personnes, est spécialisée dans l'outil d'attaque. Un énorme disque de 3,5 mètres de diamètre.

 

Vous parlez donc « mines de charbon ». A ton époque, l'outil de havage devait faire 1m80 de diamètre, et il fallait se baisser pour circuler le long du front d'attaque. Tu te souviens d'une visite, en Lorraine, d'un site exploité par « soutènement marchant ». Aujourd'hui, le principe reste le même, mais la machine porte deux bras, deux outils, et la hauteur de la saignée est de 7 mètres. Autant l'électronique est allé vers la miniaturisation, autant les mines sont parties dans le gigantisme. La machine qui porte ces bras doit être monstrueuse... Sa puissance est de 1MW.

 

Tu t'intéresses aux mines, et eux à ton voyage. Le plus âgé te parle de son père, décédé il y a deux semaines. Son père, un ancien engagé de la Légion Etrangère avait toujours rêvé traverser la Russie. L'homme est ému. Il est aussi étonné de trouver un Français qui communique aussi facilement. Et qui parle un peu Anglais. Mais après une journée de monologue sur ta selle de moto, tu es ravi de trouver quelqu'un avec qui discuter.

 

Le second connait bien le Centre de Recherches des Mines de Paris à Fontainebleau. Il te parle du professeur « Salami » (pardon pour l'orthographe), et tu lui parles du Professeur Tincelin. Il se souvient aussi des HBL... Eux sont installés de l'autre coté de la frontière, à Sarrebruck.

 

Vous parlez aussi de l'ambiance particulière du fond. Partout, la même solidarité, la même conscience du niveau de risque... Un monde à part.

 

Vous allez boire une bière, et tu retrouves ta chambre. Et internet.

 

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Route Sibérienne (suite et fin) PDF  ICON_SEP Print ICON_SEP  E-mail

Dimanche 5 Septembre 2010

 

Tu quittes l'hôtel après une nouvelle séance d'Internet. Mais tu n'as trouvé aucune nouvelle information à propos des ferries vers le Japon. Seulement des vieux messages sur les forums de voyage. Tu les avais déjà lus alors que tu étais encore en France.

 

Tu tournes un peu dans un quartier d'habitations à la recherche d'un distributeur de billets. De grands immeubles, type 'HLM' dont le rez de chaussée est occupé par des magasins. C'est Dimanche, mais tous les magasins sont ouverts. Les banques aussi.

 

Les gens font leur courses, tranquillement. Personne ne fait attention à toi. Tu as déjà vu passer deux motos japonaises et Toeuf Toeuf n'intéresse pas autant que dans les campagnes. Depuis l'Asie Centrale, tu as aussi remarqué que les vieilles motos Russes (souvent montées en side-car) sont totalement absentes des grandes villes. On devait les considérer comme des engins 'agricoles', et elles ne connaissent toujours pas l'exode rural

 

En revanche, quand tu essayes de te renseigner, c'est exactement comme à la campagne : personne ne comprend le moindre mot d'Anglais. Heureusement, les deux mots russes nécessaires sont simples à retenir : « bank » et « bankomat ».

 

On te demande toujours si tu es Américain. L'image d'un monde bi-polaire a conservé une place de choix dans la conscience collective.

 

L'Anglais est partout sur les messages publicitaires, sur les tee-shirts. Souvent dans les chansons. Mais il est purement décoratif. De la même façon que tu as du mal à retenir le russe, l'alphabet cyrillique doit être un frein à l'apprentissage des langues étrangères par les Russes. On retient mieux ce que l'on lit.

 

Finalement, tu trouves un distributeur non pas à l'agence d'une banque, mais dans un supermarché. Tu achètes aussi un peu d'eau pour la route.

 

La dernière partie de route est bien différente des 3000 km déjà effectués depuis Ulan Ude. La route est bonne mais plus ancienne, moins large. Tu traverses aussi de nombreuses localités. La circulation est bien plus dense. Plus de risque non plus de tomber en panne d'essence car tu dois trouver en moyenne une station tous les vingt kilomètres. Souvent plusieurs d'affilées.

 

Cette « côte-Est » de la Russie est un peu comme la Californie : un pays à part que l'on atteint après la traversée d'un centre désertique. Un pays qui semble plutôt riche, développé.

 

Le climat et la température ont aussi changé. La végétation témoigne de la douceur de l'hiver. Il y a deux jours, tu contournais l'extrême Nord de la Chine, et tu étais à une latitude proche de celle de Londres. Aujourd'hui, tu es au niveau du Sud de la France. Demain, Vladivostok, qui doit être à la latitude de l'Espagne. Mais tu es sur une côte océanique orientale : à cause des courants froids, Vladivostok n'est pas Barcelone.

 

Tu ressens aussi la chaleur en roulant. C'est bien agréable. Tu fais deux pauses rapprochées : la première pour déjeuner, et la seconde pour prendre un café et un dessert. A la caisse, tu hésites entre un fruit et un paquet de gâteaux. Tu choisis le fruit. La caissière t'offre les gâteaux... Un enfant gâté.

 

Le passage des 40000km pour le compteur de Toeuf-Toeuf, et celui des 20000km effectués depuis le départ. Les 15000 étaient il y a moins de 10 jours. En France, tu n'aimes pas conduire, que ce soit en voiture ou en moto. Là, tu n'y fais plus attention... Mais tu seras heureux de faire une longue pause à Vladivostok, puis de rouler plus tranquillement au Japon.

 

Le soir, au moment de chercher un hôtel, tu te renseignes dans un garage. La vendeuse, une jeune et grande dame essaye de t'expliquer comment rejoindre l'hôtel, éloigné de la route principale. Arrive un homme, plus âgé mais tout aussi grand et aussi large qu'elle. Ils ont l'air de bien se se connaître, d'être amis. Ils discutent du haut de leur 1m90. Ils ont l'air très doux, un peu embarrassés de leurs corps si grands.

 

Finalement, la femme vient vers toi et t'explique que cet ami va te guider jusqu'à l'hôtel.

 

Vous rentrez dans un joli petit village ouvrier. Tout a l'air bien étudié, bien construit. Bien agréable aussi. Les vieilles cheminées d'usine ne font pas désordre. Une sorte de « site modèle », où il faisait bon vivre la révolution prolétarienne. Ici, les rues sont goudronnées et les mères de famille circulent avec leur landau sur des trottoirs, à l'ombre des rangées d'arbres. Rien à voir avec les villages de campagnes perdus dans la Sibérie.

 

A deux reprises, des oeuvres d'art : des statues qui représentent des ouvriers, ou des mineurs. D'autres enseignes témoignent aussi du passé soviétique.

 

Vous arrivez devant un petit immeuble. Aucune inscription pour indiquer un hôtel mais ton guide te fait rentrer. Il trouve une dame qui répète à plusieurs reprises « niet ». Il ne doit plus avoir de chambre libre.

 

Vous repartez, prenez des chemins de terre et arrivez à un bâtiment moins joli. Un homme est assis devant. Tu comprends que « niet problem »... Tu dois être dans un « bed and breakfast ». Vous rentrez tous les trois. Une femme s'active au rangement et un autre homme arrive. Il a tout l'air d'avoir bien bu. La situation ne te plait guère. A ton guide non plus. Il te fait signe de repartir. Tu apprécies bien cet homme : grand, calme et souriant.

 

Finalement, vous arrivez au parfait hôtel de campagne, au milieu d'une grande pelouse verte. Un vrai hôtel, propre, avec des chambres, des douches et un bon restaurant... Pas d'internet, mais il ne faut pas être trop exigeant.

 

Les touristes étrangers ne doivent pas être bien nombreux ici, et tout le monde est prévenant avec toi. Tu as entendu ton guide insister pour la sécurité de la moto et on te fait rentrer Toeuf Toeuf dans la chaufferie sous l'hôtel.

 

 

Lundi 6 Septembre 2010

 

Tu vois un panneau « Vladivostok-333km » peu de temps après avoir quitté l'hôtel. Tu savoures ces derniers kilomètres. Pour la première fois depuis le début du voyage, tu as l'impression de finir un chapitre estival : le bloc « Eurasie ». Le Japon, c'est un peu à part...

 

Mais si le nombre de kilomètres est faible, tu mets du temps à les parcourir. La circulation est de plus en plus dense. Les agglomérations se succèdent. Les zones de travaux aussi. Tu trouves même des embouteillages.

 

Des vendeurs – surtout des vendeuses - de fruits et légumes ont installé leurs étalages sur le bord de la route. Ils proposent des pastèques. Aussi des tomates, des champignons et des oignons. Les dames sont parfois des grand-mères, habillées comme des « poupées-russes ». Tu n'oses pas t'arrêter pour les photographier. Il y a aussi des femmes plus jeunes. Elles lisent généralement un bouquin en attendant le chaland. Elles sont des dizaines à chaque abord de village.

 

Les barrages de police sont bien nombreux dans cette région. Peut-être une dizaine dans la journée alors que tu n'en voyais pas jusque là. Tu seras toi-même arrêté peu de temps avant d'arriver à Vladivistok. Juste pour te demander « Where are you from? ».

 

Tu passes le panneau « Vladivostok ». Tu vois l'océan Pacifique. Un peu d'émotion quand même...

 

A nouveau, tu es surpris par la taille de la ville. Tu suis une « rocade », sans trop savoir où aller. Au port pour prendre des renseignements sur les départs de bateau ? Ou alors au moto-club dont André, le géant finlandais croisé au Kazakhstan, t'avait donné l'adresse ?

 

Tu n'avances plus. Trop d'embouteillages. Tu quittes la rocade. Tu décides de demander à un homme assis si il connait l'adresse que tu as notée. Sans trop y croire. Coup de chance, il est chauffeur de taxi et possède des cartes de la ville. Il t'explique comment t'y rendre. Environ 7km.

 

Arrivé sur place, le bâtiment semble fermé. Un grand hangar. Le magasin est effectivement fermé le Lundi, mais la porte s'ouvre et Mikaïl sort. André t'avait parlé de Mikaïl... la personne qui parle Anglais! Tu es le bienvenu. L'hébergement est gratuit. Il t'explique où trouver à manger, où te laver, … Tu pourras aussi travailler sur Toeuf Toeuf, ou faire appel à leurs services si besoin. Tu as effectivement prévu une bonne révision... Mikaïl te parle d'André, mais aussi de David qui est passé la semaine dernière. Il sait aussi que la bande des quatre va bientôt arriver! Le monde est petit.

 

Le hangar est sur plusieurs niveaux. Des motos par dizaines. Des japonaises et beaucoup de Harley. Mais aussi des vêtements, des pièces détachées, ... Un petit bazar vertical. Tu dormiras dans la pièce du haut, dans la salle « musique ». Les Iron Tigers ont aussi leur groupe de rock.

 

Le magasin « Vladmoto » et les membres du club « Iron Tigers » de Vladivostok sont célèbres dans toute la Russie. Le réseau des motards russes est chaleureux et généreux. Tu l'avais déjà vérifié à Barnaul. Tu es surpris par sa simplicité. Mikaïl te laissera les clés de l'endroit. Tu pourras utiliser l'eau, les outils, l'ordinateur… Il n'a jamais entendu parler de toi. Mais il ne se pose pas de question.

 

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Mardi 7 Septembre 2010

 

Pause. Repos. Grasse matinée. Dormir. Ne rien faire, ou presque. Aujourd'hui, tu n'as pas posé tes fesses endolories sur la selle de Toeuf Toeuf. Tu as eu l'intention un moment de te rendre au centre ville, pour passer au bureau de la compagnie maritime, mais il était déjà trop tard et tu as remis cela au lendemain. Il y aurait peut-être deux bateaux par semaine. Le premier le Lundi, le second le Samedi, ce qui t'arrangerait bien. Tu verras demain.

 

Tes activités sont donc limitées : nettoyage de la moto, démontage des caissons et diverses petites interventions sur Toeuf Toeuf, qui mérite quelques soins.

 

Le seul vrai souci reste les caissons qui se déchirent. Tu veux les permuter, mais Andreï te le déconseille. Il pense qu'il vaut mieux les réparer, et conserver le positionnement actuel. Garder la carte « permutation » pour le futur. Il t'emmènera demain chez un soudeur qui les remettra d'aplomb. OK pour attendre et pour voir le résultat.

 

Et puis, tu profites bien du Wifi d'une société voisine pour être à jour de tes activités internet : mails et site web.

 

Les discussions autour de toi sont toujours en Russe. Tu n'y comprends rien, mais tu aimes bien entendre cette langue. Une fois, le ton monte et tu te dis que tout n'est pas toujours rose dans le monde des blousons noirs. Mais cinq minutes plus tard, ils sont tous à discuter comme des frères autour de la grande table de la salle de réunion du club.

 

Tes hôtes sont des motards. Aussi des personnes qui aiment les voyages. Ils sont aussi des amateurs de pêche. Tu iras peut-être demain soir avec eux pour une partie de pêche aux calamars.

 

Dans la journée, les clients passent. Tu ne sais pas toujours si il s'agit de clients ou de copains. Ceux qui parlent anglais s'intéressent à ton voyage, te racontent leurs propres expériences. Les motards Russes parlent en moyenne bien mieux l'Anglais que leurs compatriotes à quatre roues.

 

En fin d'après midi, tu entends Mikaïl parler en Anglais. Il est au téléphone avec la bande des quatre. Probablement Johan, le « guide » de la bande. Ils sont à trois cent kilomètres de Vladivostok. Comme toi il y a deux jours... Tu es content de les retrouver demain.

 

 

Cette pause est aussi l'occasion de faire le point après la traversée d'un continent. Tu es heureux de ce voyage.

 

Souvent, tes amis te souhaitent de trouver ce que tu recherches. Tu ne crois pas rechercher quelque chose de particulier. Tu veux juste vivre. Apprendre, rencontrer, découvrir. Et ce voyage te comble chaque jour. Même si les relations restent superficielles. Même si il n'y a rien d'extraordinaire dans ce que tu découvres.

 

Ta vie de sédentaire était depuis trop longtemps devenue une routine complexe. L'approfondissement, l'optimisation, la recherche de la perfection, tout cela te lassait. Ta vie aujourd'hui est bien plus simple.

 

Tu es juste un peu déçu d'être allé trop vite. L'idéal aurait été de partir un mois ou deux plus tôt. Mais tu profiteras davantage du reste du voyage. Et puis, tu reviendras plus tard dans ces pays trop vite traversés. Ils ne sont pas si loin de chez toi.

 

Tes « carnets de voyage » : tu ne pensais pas que ton site pourrait autant intéresser. Tu es surpris. Tu n'as jamais été doué pour l'écriture et tes « aventures » sont assez ordinaires. Tu espérais que tes enfants, tes parents et aussi quelques amis te lisent, mais le cercle des lecteurs s'est beaucoup élargi. C'est tant mieux. Tu te rends utile. Cela te force aussi à une certaine discipline. A écrire chaque jour. Ou, plus souvent, chaque nuit.

 

La journée est passée bien vite. Tu as l'impression de n'avoir rien fait. Il faudra être plus efficace demain.

 

 

Mercredi 8 Septembre 2010

 

Un peu de rangement, de ménage, de linge à nettoyer. Puis démontage du tableau de bord de Toeuf Toeuf qui ne tient plus. Alexander de donne une colle pour « plastique » pour recoller les attaches cassées. Il faut 12 heures pour polymériser. Une courte visite chez le soudeur pour les caissons. Un atelier sous un immeuble. On y descend par un escalier défoncé, envahi par les herbes sauvages. Aucun panneau... Le soudeur est franc : il déconseille la soudure. Il vaut mieux riveter des plaques de renforcement. Cela peut être effectué au moto-club.

 

Tu vas au centre ville en taxi. Il y a bien un bus, mais son passage est aléatoire. Tu pourrais attendre la journée.

 

Au port, que des mauvaises surprises : la société Bisintour qui exploitait le navire entre le Japon et Vladivostok n'existe plus. Celle qui a repris la ligne propose un seul départ hebdomadaire, le Mercredi. Les passagers commencent à arriver pour l'embarquement... Donc rien avant Mercredi prochain, sauf pour la Corée. Une autre compagnie ne propose que des lignes sur la Corée.

Seconde mauvaise nouvelle : le prix. $500 uniquement pour la moto. A cela il faut rajouter au moins $300 pour le passager et presque $200 pour des frais annexes. L'absence de concurrence. Les prix sont 40% plus bas pour la Corée où deux compagnies se partagent le marché.

 

Tu collectes les informations, et tu décideras demain. Tu as pris rendez vous pour Vendredi pour commencer les formalités de douanes. D'ici là, tu peux aussi essayer de trouver une alternative par un autre port.

 

Tu te promènes en ville. Vladivostok l'été ressemble beaucoup à San Francisco. Les rues montent et descendent, des vieux immeubles, souvent jolis, une température douce, un port militaire...

 

Toutes les voitures sont japonaises à l'exception de quelques coréennes. Tu ne vois qu'une seule Renault Logan et deux-trois Audi en quelques heures. On ressent fortement l'influence japonaise. Tous les produits électroniques ou mécaniques proviennent du Japon. Même certains produits alimentaires... Seule la police est équipée de véhicules russes.

 

Retour au moto-club. Alors que tu vidanges ton moteur, la bande des quatre débarque. Beaucoup de choses à se raconter depuis le Kazakhstan.

 

Le soir, sortie « pêche » avec Max, Mikaïl, Christian, … et d'autres membres des Iron Tigers. L'un d'eux est moniteur de plongée. Il peut emprunter le bateau de son club et nous sommes 8 à embarquer pour pêcher des calamars.

 

La pêche au calamar dure toute la nuit. Mais elle se prépare longuement : longues discussions à propos du choix des appâts – hameçons, courses alimentaires pour la nuit, fabrication d'un matériel d'éclairage à base de batteries et de blocs phares de motos, etc...

 

On embarque vers 20h. Retour vers 5h. Tu as juste oublié de t'habiller et te de chausser en conséquence. Tu auras froid toute la nuit, malgré un sweat-shirt que tes amis te prête. Vous rejoignez, à une cinquantaine de kilomètres du port deux autres bateaux qui se livrent au même loisir que vous. De chaque bateau, on entend plaisanteries et rigolades. Les Russes sont des bons vivants. La pêche au calamar est avant tout un moment à passer entre copains.

 

Le butin de la nuit consiste en une cinquantaine de kilos de calamars. Pour ta part, tu n'auras attraper qu'une seule pièce. Pas terrible. Tu as aussi trouvé le moyen de perdre la vis de frein du moulinet que Mikaïl t'avait prêté. Mais tu auras bien profité d'une nuit pendant laquelle tes compagnons se sont bien amusés. Même si tu es heureux d'aller te réchauffer au petit matin.

 

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Jeudi 9 Septembre 2010

 

Levé tôt pour aller au port avec la bande des quatre. Comme toi, ils doivent rejoindre le Japon, mais ils ont un autre souci : leurs visas expirent Vendredi, avant le prochain bateau. Les histoires de papiers en Russie sont déjà bien compliquées quand on est en règle. Ils doivent donc prendre le premier bateau, que la destinatin soit la Corée ou le Japon.

 

Les formalités sont plus complexes à Vladivostok que partout ailleurs. Pour Zarubino, l'autre port russe d'où partent des ferries, il est suffisant d'arriver le jour même pour effectuer toutes les démarches de douanes et de police. En revanche, deux à trois jours sont nécessaires à Vladivostok. Personne ne sait pourquoi. Malheureusement, le bateau de Samedi part justement de Vladivostok pour la Corée.

 

Finalement, un détour par la Corée te plaît bien. Vous achetez les billets. Le coût des deux traversées est équivalent à celui de la liaison directe.

 

En fin de journée, tu vidanges l'huile de ta fourche et tu termines l'entretien de la moto. Andreï et Alexander t'aident quand tu as besoin. Ils réparent aussi tes caissons latéraux en ajoutant une plaque d'aluminium pour la consolider. Du beau travail.

 

Un petit tour pour tester la moto. Une mauvaise surprise : le compteur de vitesse que tu as dû partiellement démonter ne fonctionne plus. Tu le remontes une seconde fois, mais toujours rien... Tu essayeras de le remplacer au Japon. La fonction « compteur journalier » avait déjà lâché en Turquie, et il était dans tes plans d'essayer de le remplacer.

 

L'huile de fourche est plus épaisse que la précédente (grade 10 au lieu de 5). Tu sens une grosse différence dans la suspension. Pourvu que les joints spi supportent la pression. Et tes bras la fatigue.

 

Le soir, la bande des quatre revient d'une après midi passée au bureau de l'Immigration. Ils ont réussi à prolonger leurs visas de trois jours. Tout le monde discute autour de bières. Du thé pour les Russes. Nos hôtes ne boivent aucune goutte d'alcool quand ils doivent conduire. Cette rigueur chez des gens plutôt fantasques te plaît.

 

Chacun raconte ses aventures, ses voyages, ses projets. On parle aussi des autres moto-clubs russes. Il y en a dans toutes les grandes villes du pays. Faire le tour de la Russie est déjà une grande aventure. De longues routes, mais aussi des espaces énormes sans personne, et sans goudron.

 

Dans la pièce du haut, Andreï joue de la guitare électrique. Tu apprécies bien Andreï. Avant d'être mécanicien, il était cheminot. Un jour, il a décidé de changer de vie et est devenu mécanicien moto. Il a tout du père de famille pépère et doux. Mais il est aussi motard et rocker. C'est lui qui vient te voir régulièrement pour te demander si tu as besoin de quelque chose. Qui t'aide à régler les soucis que tu rencontres. Ton ange gardien.

 

L'hospitalité dans les moto-clubs russes est la règle. Tu en profites mais tu apprécies surtout la simplicité des choses. Une générosité sans calcul. Une confiance totale. Tu espères bien qu'à ton retour, ta grande maison hébergera aussi ces motards, ou d'autres voyageurs.

 

Tu ressens que tu as une nuit à rattraper. Tu abandonnes tes amis pour aller dormir.

 

 

Vendredi 10 Septembre 2010

 

Rendez vous à 9h au port pour les formalités douanières. On est un peu en avance. On attend.

 

10h. On déplace les motos devant l'entrée de la douane. Les personnes de la société maritime photographient les plaques et des numéros de châssis avant de les rentrer dans la zone sous douane. Au revoir Toeuf Toeuf! Puis retour au bureau de la compagnie maritime, où l'on attend. Vers 11h, Johan et Steen peuvent aller à la douane avec Katia, qui est chargée de nous aider dans nos formalités. Vous restez trois à attendre.

 

12h. La bande des quatre à rendez vous au bureau de l'Immigration. Kun et Bavo s'y rendent. Tu restes seul à attendre.

 

13h. La bande des quatre revient. Ils ont leurs visas. Mais Johan et Steen ont attendu pour rien à la douane. Vous attendez à nouveau tous ensemble. Probablement que l'on vous dise de retourner à la douane.

 

Tu es devenu un expert en attente. Tu serais capable désormais d'attendre des jours sur la même chaise. Un long apprentissage pour en arriver là. Tu n'imaginais pas que tu avais, cachée en toi, une telle capacité.

 

13h30. Vous sortez boire un coup sur la terrasse du terminal maritime. Tu testes l'attente « outdoor ». A la radio, une chanson sur cinq ou dix est en Français. Les Russes adorent écouter des chansons Françaises. Davantage que les Français. Tu réalises que tu ne sais plus ce que tu attends.

 

14h. Vous retournez attendre à l'intérieur.

«

    • Qu'attendons nous ?

    • Des informations de la part de la douane. Les douaniers sont très occupés et ils nous téléphoneront ici, au port, quand vous pourrez passer.

    • Compris. »

 

15h. Un peu d'action : on vous demande vos cartes d'Immigration pour en faire une copie.

 

16h. Tout s'accélère. Vous prenez une voiture pour vous rendre au bureau des douanes de Vladivostok. Vous allez, sans passer par la salle d'attente, jusqu'au bureau des coups de tampons. Tu passes en premier. Un bureau avec cinq ou six employées. Partout, sur les bureaux, parterre, des piles de dossiers. Souvent de plus d'un mètre de haut. Tu es assis devant une dame en uniforme de douanier. Elle ne te regarde pas. Elle poursuit la consultation de ton dossier.

 

La dame n'a pas l'air commode. Rien ne lui va. Tu le vois à ses grimaces. Les formulaires ne sont pas complètement remplis et Katia se fait taper sur les doigts. Manque le numéro du moteur. Chance : tu l'as dans ton Carnet de Passage en Douanes. Quelle puissance le moteur ? Tu donnes la puissance fiscale, mais cela ne convient pas du tout. Elle croit que tu te moques d'elle. Le temps que tu trouves la puissance réelle, la dame passe à la question suivante : où est ta « registration » pour Vladivostok ? Quelle est ton adresse ? Tu réponds que tu es logé dans une « Guest House », dont tu ne connais pas l'adresse. Cela ne plait pas non plus. Une longue grimace. Tu sors d'anciennes fiches de « registration » pour les hôtels de Chita, Ulan Ude.... Elle ne les regarde pas mais paraît s'en contenter. Elle passe de longs moments à vérifier les photocopies du passeport, de la carte grise,... Tu en profites pour prendre une photo des piles de dossiers sur le sol. En cachette. Tu voudrais bien lui demander si tu peux photographier ses mains, mais tu n'oses pas. Toutes ces dames ont de longs (faux?) ongles bien travaillés. Elles ont aussi des jupes très courtes. Tellement remontée pour l'une d'entre elles que l'on croirait une mini-jupe. Andreï t'avait dit que les filles de Vladivostok sont belles. C'est vrai. Tu observes le visage de la dame qui s'occupe de ton dossier. Peut-être est elle agréable dans le civil ? Tu aimerais bien le savoir.

 

Finalement, tout semble s'arranger, et tu laisses ta place au suivant. Pour la bande des quatre les formalités se passent beaucoup mieux. Tout au moins plus rapidement.

 

Tu sors prendre l'air. Le bureau des Douanes est au dessus du port des marchandises. Des bateaux en provenance du Japon ou de Corée, on débarque des automobiles, ou des engins de travaux publics. Parfois, les bateaux repartent avec des rouleaux de tôle d'acier. La valeur ajoutée n'est pas la même.

 

18h. On t'appelle. L'ensemble de la bande des quatre est passée en une demi-heure. Le même temps que pour ton seul dossier. La dame doit sentir la fin de la journée arriver. Elle vient vous remettre vos dossiers. A tous sauf à Bavo et à toi. Motif : la photo avec le numéro du châssis n'est pas visible. Vous devrez revenir demain! Troisième journée d'administration consécutive pour Bavo. Toi, tu as eu une demi journée de repos hier après midi. Tu n'es pas à plaindre. Katia vous informe aussi que le bateau partira non pas Samedi, mais seulement Dimanche.

 

Vous cherchez un taxi qui accepte que vous montiez à cinq, et dont le prix n'est pas exagéré. Le coût normal devrait être 200 ou 250 roubles. Il faut à chaque fois négocier. Johan est le négociateur du groupe. Le temps de trouver la perle rare, vous rejoignez la « box » à 19h. Tu souhaitais rentrer le plus vite possible pour faire tes adieux à Andreï. Andreï se rend pour le weekend à un rassemblement de motards, et il ne travaillera donc pas ce Samedi.

 

Les moto-clubs russes organisent souvent des rassemblements à « l'américaine ». Il y en a quatre ou cinq rien que pour le « far-east » russe. Le plus célèbre est celui de Vladivostok qui se tient début Octobre. Des milliers de motards affluent de tout le pays, et aussi de l'étranger, sur le centre ville. Là, Mikaïl donne le départ d'une longue procession à travers la ville. Les autorités jouent le jeu et bloquent la circulation pour l'évènement. Puis, tout le monde se retrouve pour faire la fête, écouter de la musique, boire un peu de bière. Certains de ces rassemblements se finissent sur les plages.

 

Deux rassemblements sont aussi organisés pour l'ouverture et la fermeture de la saison. L'hiver est très rude. Il faut fêter la sortie de l'hibernation, et aussi -moment plus triste- la fin de la saison estivale. Beaucoup de choses s'arrêtent pendant l'hiver. La baie de Vladivostok est sous deux mètres de glace, la ville souvent sous la neige. L'année dernière, la température est descendue à -35°C. C'est dur à imaginer alors qu'il fait encore plus que 25° mi-Septembre.

 

20h Vous allez diner dans un restaurant chinois. Tu n'as rien mangé depuis la veille. A la fin du repas, Andreï passe vous faire un dernier adieu.

 

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Bye-Bye Vladivostok! PDF  ICON_SEP Print ICON_SEP  E-mail

Samedi 11 Septembre 2010

 

Bavo et toi prenez un taxi pour le terminal maritime où vous avez rendez-vous à 9h. Par hasard, c'est le même chauffeur, un vieux monsieur, qui vous a déjà conduit deux jours plus tôt. La discussion s'engage. Les voyages, les motos, … Notre chauffeur nous pose des questions. Tu ne sais que répondre « Da... ». Souvent les Russes te parlent comme si tu comprenais tout ce qu'ils disent.

 

L'inspecteur des douanes arrivent vers 10h30. Un jeune, sympathique, que vous aviez croisé la veille. A 11h tout est bouclé. Vous sortez du terminal, étonnés que tout soit allé si vite. Deux heures.

 

Vous n'avez rien prévu pour le reste de la journée, seulement de retrouver les autres en fin d'après-midi. Vous vous promenez en ville. Le centre-ville est désert par rapport aux autres jours de la semaine. Beaucoup de policiers un peu partout. Etrange. L'après midi, vous comprenez : un match de foot. Le stade n'est pas particulièrement rempli, mais les policiers sont venus en force. Comme dans tous les pays, le foot est sous surveillance.

 

Vous rencontrez Graham sur sa KLR. Tu as oublié de parler de Graham, mais il est passé brièvement au moto-club hier et devait vous y rejoindre aujourd'hui. Tu lui avais donné les coordonnées de David. Graham, comme David, souhaite renvoyer sa moto sur l'Angleterre au moindre coût.

 

Avec Graham, tu évoques aussi la Mongolie. Il est parti de Londres en Juin, et arrive après trois mois à Vladivostok. Comme toi, il aime rouler doucement et regrette d'avoir traversé trop vite la Mongolie. A Londres, il travaille à son compte comme artisan universel : plombier, électricien, menuisier, etc... Il a abandonné ses clients pour trois mois. Tu penses à un copain, qui fait le même métier et qui pourrait vivre la même expérience, si il le décidait. Une belle expérience.

 

On passe un bon moment à rechercher le café « wifi » où l'on s'est donné rendez-vous. Les trois autres sont déjà là. Ils ont des rendez-vous « Skype » avec leurs compagnes. Tu peux aussi mettre à jour ton site et relever tes e-mails. Justement, un mail de David. Il a repris ses activités à Londres, le retour lui fait drôle. Il te raconte aussi qu'il avait failli se faire rançonner près de Chita. Un homme lui demandait $3000 pour l'avoir aidé à réparer un câble. Pour se faire mieux comprendre, il avait sorti un révolver. A priori tout s'est bien terminé puisque David te raconte cette histoire.

 

Votre dernier repas à Vladivostok. Vous vous offrez un bon restaurant. Un grand nombre de tables est réservé pour un mariage, et vous êtes une nouvelle fois un peu « intégrés » dans une fête. Une des amies des mariés vous raconte que son père est aussi en voyage longue durée en moto. Il est actuellement au Kazakhstan. Ces derniers mois, il avait voulu traverser l'Afghanistan, mais a eu quelques problèmes avec les Talibans, qui l'ont finalement relâché. Il vaut mieux rester à l'écart des zones à problèmes.

 

La nourriture est bonne. Le serveur vous incite à l'accompagner de vodka rouge. Pourquoi pas... Les Russes accompagnent souvent leur repas de Vodka. Mais Kun vide ses verres aussi vite qu'il les remplit. Il finit le repas bien éméché. Il tombera plusieurs fois sur le chemin du retour.

 

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Dimanche 12 Septembre 2010

 

Pour la quatrième fois consécutive, vous vous levez tôt pour vous rendre au port. Mais cette fois pour un embarquement. On vous a demandé d'arriver avant 10h, pour un départ à 14h. Pour vous permettre d'attendre en toute tranquillité.

 

Première attente dans le bureau de la compagnie. Tu as les passeports et les billets de la bande des quatre. Tu es le « waiter » de toute l'équipe. Tu observes les autres passagers : Russes ou Coréens. Tu réalises que leurs tenues, leurs mains sont impeccablement propres. Tu as perdu l'habitude de l'impeccable. Tu ne sais plus de quand date ton dernier rasage. Ni le dernier lavage de ton pantalon « de ville ».

 

Le bateau part à l'heure. Un vieux ferry, bien rouillé. Une cinquantaine de passagers au total. Les seuls véhicules sont vos cinq motos et trois vélos conduits par des jeunes russes.

 

Vous êtes sur le pont lorsque le navire appareille. Le port de Vladivostok ne cache pas son activité : la Russie y exporte du charbon et des feuillards d'acier. Elle importe des voitures, des camions et des engins de travaux publics. Et aussi de tout par container. Vladivostok avec Nakhodka sont les deux gros ports de commerce avec les autres pays de la zone AsiaPac. La plupart des navires repartent à vide.

 

Vous faîtes vite le tour du bateau. Le navire est vétuste. La dernière couche de peinture date. Pas de douche dans les cabines, mais une sorte de hammam collectif pour tout le bateau.

 

Les passagers sont peu nombreux. Les Russes discutent facilement entre eux. Ils s'intéressent aussi à vos voyages. Parmi eux, un groupe de marins. Ils rejoignent leur navire en Corée, pour partir ensuite sur l'Amérique du Sud, à Montevideo. Sur le ton de la plaisanterie, tu évoques l'idée qu'ils pourraient embarquer Toeuf-Toeuf... Ils vont en discuter avec leur chefs, mais cela pourrait peut être se faire. Tu n'y crois qu'à moitié, et tout cela paraît aussi un peu aventureux.

 

Actuellement, tu ne sais plus trop comment se passeront les deux mois qui viennent. L'option initiale : expédier la moto par avion en Australie depuis le Japon est très onéreuse. La valeur de la moto. Par mer ? Tu ne profiterais pas assez de Toeuf Toeuf en Australie. Tu opterais donc plutôt par une expédition maritime directement en Argentine qui économise aussi le transfert depuis l'Australie. Mais tu as découvert récemment que les expéditions depuis la Corée coûteraient environ trois fois moins cher que celles depuis le Japon.

 

Tu pourrais donc expédier Toeuf Toeuf depuis la Corée. Peut être rapidement vers l'Australie. Tu ne serais alors sans moto que sur la partie Japonaise du voyage. Beaucoup d'options. Tu devras décider dans les 3-4 jours qui viennent. Tu cherches à éviter les solutions inutilement onéreuses. Tu te sens aussi concerné par le coût écologique de ces transferts. Tes enfants n'apprécient pas que tu fasses n'importe quoi avec leur planète.

 

Tu t'es assis près de la seule prise de courant de la salle commune. En face de toi, un homme complètement saoul t'a rejoint. Tu l'ignores. Les Russes boivent trop. Tu commences à fatiguer de voir si souvent des gens saouls. Le pire était la Mongolie, mais l'Asie Centrale et la Russie ne sont pas en reste.

 

Le voyage dure environ 18 heures. Au petit matin, vous arrivez au port de Sokcho, en Corée du Sud.

 

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